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vers Carnets d’une ‘pataphysicienne-2

Geste des opinions du docteur Lothaire Liogieri
 

CARNETS D’UNE PATAPHYSICIENNE 1
 

<Qui n’a rien à espérer ne doit désespérer de rien> Sénèque, Médée 2. v. 163.
 

Berthe Morisot, La Fable
TABLE :
Reconnaissance, retrait, effraction.
Bonheur et soumission. 2. Possession ou responsabilité. 3. Du lien, du viol, des Héros; des Olympiens et des Modernes. 4. Adunata ‘patasophiques. 5. Vautours et psychologie de la création. 6. Fin de la politique, ennui de la politique… 7. Marguerite Duras aux fourneaux. 8. Travail et libération de la femme. Harcèlement ubuniversitaire. Un mot de Michelet. Maxime ‘patasophique. Callimaque et la mort. 9. Sous le sable… 10. Claude Bessy et la Danse du Père Ubu.
Un mot d’esprit de Jean Paul 2. 12. En relisant Plutarque et Platon : que tout ordre social est fondé sur la haine. 13. Tirésias, la femme et son secret. 14. Lesbianisme et < identité culturelle >… 15. L’horreur astronomique. 16. L’ horreur orthographique. 17. Perles travaillistes. 18. Au Lycée Henri 4… 19. Un homme qui aimait les femmes. 20. Du jeu des Olympiens. Séduire Nécessité. Hélène ou Platon? 21. Dogme et < virginité consacrée >. 22. Troie. Palamède et la ‘pataphysique. 23. Du cosmopolitisme. 24. Deux fragments de l’idéalisme magique, de l’herméneutique et de l’occultisme jüngeriens. 25. Perles. 26. Robert Musil. De la ville ou du principe de raison insuffisante.
A propos de l’Effroyable imposture, de Th. Meyssan, Alain Finkielkraut, béatitude : < l’abolition des censures permet de refaire l’Histoire >. 28. V. Despentes chez G. Debord. 28bis. Socialisme et utopie informatique. 29. De la ‘pataphysique. 30. La Bruyère et la curiosité. 31. Le Shakespeare nouveau de Jean-Michel Déprats. 32. La soif du martyre. 33. Péronnelles… 34. Christianisme soft et conception tragique de la vie. 35. Restif de la Bretonne et le pays des < Mégapatagons >. 36. Une question embarrassante…. 37. Du prétendu irénisme féminin. 38. Schizophrénie. 39. Les < Droits de l’homme > contre la mort choisie. 40. Ton sur ton. 41. Violence et Jeunesse. 42. < Oedipe sans complexe >. 43. Sur Lucien. La Vénus hottentote retrouve sa dignité… 45. Fellini, à propos de Buster Keaton. 46. Actualité du sycophante. 47. Ascension et merveilleux chrétien. 48. La matrone de Pétrone. 49. Hapax, frivolité et ‘pataphysique. 50. Big mother ou… le nouveau paternalisme. 51. Pascal sur la < planète foot >… 52. Modestie de la ‘pataphysique. 53. Diana Mosley ou une autre vision de l’ < Histoire >. 54. Les extravagances de Niki de Saint Phalle. 55. < Grand et petit >, Botho Strauss et la séparation. 56. André Breton, Oscar Panizza et < l’Eternel Féminin>. 57. Une symphonie ‘pataphysique. 58. Bunuel, le hasard et < le fantôme de la liberté >.
De la ‘pataphysique et de la nonchalance. 60. Au nom d’Ubu le Grand et Miséricordieux ( Oriana Fallaci, La rage et l’orgueil ). 61. Les confidences d’un < homme de pouvoir > ( E. Orsenna ). 62. De l’autorité ou sur un mot de Hanna Arendt. 63. Marivaux, du hasard et de la méthode. 64. Du hasard, de la guerre et de la mort ( René Quinton, Maximes sur la guerre ). 65. Flagornerie. Un conseil de Mazarin. 66. Dieu peut-il être trompeur ? 67. Un mot de Dorimène. 68. Expliquer l’inexplicable par l’inexpliqué…
De l’utopie. 70. Disparition de Stephen Jay Gould. 71. Le magistrat, la loi et le foetus. 72. Mammographie de Mère Ubu… 73. De l’insolence, de l’insolite et de la ‘pataphysique. 74. Picasso… Picassiette. Tourisme pataphysique : la France insolite et le religionnaire. 75. D’une proposition insolite : prostitution libre et gratuite. 76. Les mots. 77. ‘pataphysique de la terreur (esquisse). 78. De la fesse et de l’herméneutique… 79. De la récurrence. 80. De la conscience morale comme maladie de l’âme. Nietzsche, Généalogie de la morale, 2. Se libérer du poids de l’opinion des autres. 81. Mise en scène et… vocabulaire de la démagogie. 82. Giraudoux, le poète et la richesse. 83. Un mot de Jean de La Fontaine. 84. Un débat de notre temps. Prostitution. Proxène… 85. Pataphysique du clonage. 86. La curiosité selon Maurice Rheims. 87. Jean Cocteau. La machine infernale. 88. Hypostases ou… Plotin au Collège.
Aux Chevaliers du Graal, à tous les chevaliers du < Graal> , aux quêteurs de < Sens >…
25.07.2002…

JEANNE DE LA TYSSE, CARNETS.
 
< … Innocence, tendre vertu, Mon innocence, où donc es-tu ? -Partie, emportée, envolée, A jamais, je m’en suis allée… >
Sappho ( Cité par Démétrius, De l’Eloquence, 140. Traduction Marguerite Yourcenar )


En guise de pense-bête : reconnaissance, retrait, effraction.
 < … Comme le suggéra naguère Pervenche d’Arcis ( La démesure de Sandomir ) le drame ‘patasophique est le cadre d’une inquiétante métamorphose.
Trois moments définissent la progression psychologique de la ‘pataphysicienne. La reconnaissance, le retrait, l’effraction.
-La reconnaissance naît d’une fèlure irréparable qui suspend son intégrité morale et fait d ‘elle un esprit dubitatif saisi par l’ironie à l’égard de la vie et sujet à la perte d’identité. Le drame est longue incubation du passage à l’acte. Moi éclaté, dispersé, elle s’évade de l’enfermement sociétaire et conquiert son propre désordre.
Devenir ‘pataphysicienne, c’est alors une manière singulière de respirer. C’est accomplir le geste nominaliste. Dégagée de toute allégeance à une quelconque raison suffisante la ‘pataphysicienne n’est pas un jugement analytique incarné ; c’est une juxtaposition d’avatars et une suite d’événements.

La reconnaissance mène au retrait. Terme qui désigne le sujet en rupture, l’ exilée volontaire, libre tribade de l’écart, bayadère du clinamen, la dilapidatrice.
-L’effraction contre l’ordre axiologique transgresse enfin les lois de la religion -de toutes les religions- et déroge au pathos de l’éthique en lui substituant les règles de l’esthétique.
Effraction inexpiable.
Passer à l’acte c’est donc, ainsi qu’à sa manière l’envisagea Bergson, mettre le feu aux langages : mais c’est plus profondément instaurer un désordre suicidaire, mûrement réfléchi, prémédité.
C’est représenter l’innommable. Et derechef acquérir une nouvelle identité. >
Jeanne de La Tysse, Correspondance à Solange, Lettre 37.

Bonheur dans la soumission.
Extraits d’une lettre de Bérénice :
… Ces deux citations qui vont à l’essentiel :
< … ce n’est qu’aux moments où tu me fais souffrir que je suis sans danger. >
< … les esclaves de Glenelg étaient amoureux de leur maître, c’est qu’ils ne pouvaient se passer de lui, ni de leur esclavage. >
Jean Paulhan, Le bonheur dans l’esclavage.
Qu’est-ce que la soumission ? Ce n’est pas du masochisme. Ou pas seulement. Explication trop superficielle. C’est de la sotériologie. Les hommes et les femmes trouvent dans la douleur, la soumission et l’esclavage consentis ce que ni la médecine, ni la morale, ni la philosophie, ni la religion ne peuvent leur apporter : la certitude, la sérénité, la paix intérieure.
Thèse aussi paradoxale que scandaleuse.
Voir Pauline Réage ( Histoire d’ O., roman et éros théologiques. )
Ainsi le fantasme du SS ( les initiales de Sir Stephen ) substitut du Dieu de la Bible, désiré comme force pure, brutalité métallique, puissance, et surtout support inaltérable de la fidélité recherchée.
< … et elle devint captive avec délices, sentant à ses poignets, à ses chevilles, à tous ses membres et au plus secret de son corps et de son coeur les liens les plus invisibles que les plus fins cheveux, plus puissants que les câbles dont les Lilliputiens avaient ligoté Gulliver, que son amant serrait ou desserrait d’un regard. Elle n’était plus libre ? Ah! Dieu merci, elle n’était plus libre. Mais elle était légère, déesse sur les nuées, poisson dans l’eau, perdue de bonheur >.
< …Ceux qui aiment Dieu, et que Dieu délaisse dans la nuit obscure, sont coupables, puisqu’ils sont délaissés…>
< … La certitude d’appartenir à René, la comblait, et dans l’abandon où elle était vis-à-vis de lui, la rendait invulnérable, irresponsable…>
< … il est terrible de tomber entre les mains du Dieu vivant. Non, se disait-elle maintenant, ce n’est pas vrai. Ce qui est terrible c’est d’être rejetée des mains du Dieu vivant. >
Schéma relationnel analogue chez Liliania Cavani ( Portier de nuit ).

Possession ou responsabilité.
A Odile :
Esquisse d’un parallèle de deux univers axiologiques, de deux sentiments de la vie :

  1. Anankè, Atè, envoûtement, poésie, mantique, oracle, transe, Eschyle, Pindare…
    Le tragique. Justification esthétique de l’existence. Le spectacle et le rire des dieux.
    Le monde d’Homère.
  2. Perfectibilité. Conscience, volonté, raison, responsabilité, Rousseau, Kant…
    Le progrès. Justification éthique de l’existence. L’éducation et le pédantisme des clercs.
    Le monde des Modernes…

Du lien, du viol, des Héros, des Olympiens, et des Modernes.
Courriel d’ Odile:

  1. Faire du viol un style, presqu’un art de vivre, un moment originaire et même un principe fondateur, tel fut au jugement des Modernes le geste scandaleux des héros de la mythologie grecque et de leurs maîtres, les Olympiens.
    Une rapide recension parlera d’elle même :
    -sacrilège d’Ajax commis contre Athéna arrachant de force Cassandre à la statue de la déesse lors de la prise de Troie. – viol d’Augé par Héraclès à Tégée. -viol de Dada par Scamandre en Crète, au Champ de l’impudeur. -viol de Pélopia par Egisthe. -viol d’Erinona par Adonis. -viol d’Héra enfant par le Géant Eurymédon. -viol d’une jeune fille de Témésa par Politès. -viol de Gorgo par Poséidon. -tentative de viol de Halirrhotions sur Alcippé la fille d’Arès. -tentative de viol d’Héra par Ixion. -viol de Philomèle par Térée. -viol de Philyra par Cronos. -viol de Pyrénè par Héraclès. -viol de Rhoxane par Médos. -viol de Réa par Arès.
    etc…
    Comment échapper à Nécessité, comment se dégager des filets d’or ?
    Viols, parjures, tabous levés, incestes, parricides, monstres, Médée… Autant de pseudo-solutions et autant de pièges.
    Anankè demeurait la plus forte : on ne part pas. On délire…
    A rapprocher de la matière germanique et de son ultérieure transposition wagnérienne. Voir par exemple la tristesse de Wotan ( La Walkyrie, acte 3 )…
  2. A mettre enfin en parallèle avec l’ idiosyncrasie des Modernes avides de < liens > comme ils sont assoiffés de < sens >.
    Et qui fétichisent le plus religieusement ( religare ) du monde le < lien marchand >, le < lien social > et le < lien politique> -leurs trois Charites ; la science politique, l’économie et la sociologie étant conviées à fonder rationnellement la < société > afin de sortir l’ < humanité > de < l’état de nature >.
    Pédantes fictions…

Adunata ‘patasophiques, suggestions :
 De Charmante, ces quelques indications pour un projet… insensé :
< On sait que selon l’adage, < à l’ impossible nul n’est tenu >, l’impossible caractérisant une modalité de l’être et du jugement à l’instar du possible, du nécessaire et du contingent.
Cet adage ne saurait pourtant satisfaire la ‘pataphysicienne. Et il est vrai que nombreux sont ceux qui ont emprunté la voie tortueuse de l’adunaton. Au premier rang desquels et pour s’en tenir aux arts plastiques, Escher. On proposera à titre d’essai et pour s’en tenir à la philosophie ces quelques pistes :

  1. Doctrines impossibles :
    Dynamique parménidienne ; Statique héraclitéenne ; Matérialisme platonicien ; Spiritualisme épicurien ; Dogmatisme sceptique ; Scepticisme stoïcien ; Manichéisme augustinien ; Pyrrhonisme thomiste ; Réalisme ockamien ; Occultisme galiléen ; Monisme cartésien ; Athéisme pascalien ; Mécanisme leibnizien ; Rationalisme humien ; Amoralisme kantien ; Eclectisme hégélien ; Fétichisme comtien ; Empirisme husserlien; Fidéisme nietzschéen; Intellectualisme merleau-pontien ; Travaillisme heideggerien ; Nécessitarisme sartrien…
  2. Méthodes impossibles :
    Poème conceptuel ; Apophtegme dissertatif ; Dialectique tautologique ; Diaporématique apodictique ; Parénétique silencieuse ; Lettre indéchiffrable ou écrite à l’encre sympathique ; Confession hypocrite ; Consolation exubérante ; Question imposée ; Méditation errante ; Associationnisme méthodique ; Dialogue à une seule voix ; Enquête résolue ; Phénoménologie mathématique ; Spontanéisme réflexif…
  3. Concepts impossibles :
    absolu relatif ; absurde rationnel ; accident substantiel ; acte potentiel ; affection insensible ; aliénation libre ; aversion amoureuse ; angoisse sereine ; apodicticité problématique, etc…
    Le tout… à définir.
  4. Textes impossibles avec commentaires, gloses, disputes…
    Tâche particulièrement ardue… mais il y a de quoi faire pour les soirées d’hiver et les jours de mélancolie…
  5. Exercices impossibles, par exemple dissertations sur sujets tronquées, explications de textes aberrants, essais avec procédés rhétoriques imposées… >
    Charmante a bien les jeux de son âge…

Vautours et psychologie de la création.
De Bérénice, un mouvement d’humeur :
… cette communication due à la plume ou.. au clavier d’un célèbre sémioticien dans un quotidien du matin. De laquelle il ressort que l’écriture sur ordinateur ne simplifierait pas la tâche de l’analyse critique des brouillons :
< Pour établir la critique sensée d’un brouillon ou de ses variantes, il est indispensable que l’auteur ait conservé les différentes phases manuscrites de son travail… et il est très intéressant de pouvoir suivre les repentirs, les bouleversements substantiels, les variations infimes que l’auteur a pratiqués sur son texte. >
Sans doute ; mais la belle affaire… Nous connaissions la manie nécrophile de < déterrer les morts et d’investir les dieux des autres > ( Jünger ) ; nous aurons désormais les petits cochons truffiers de la < création électronique >.
En attendant les délateurs…
Transposée, la critique continuera donc à prospérer sur les dépouilles des malheureux auteurs. Qui ne demandent pourtant qu’une chose : qu’on les laisse à leur marotte et qu’on leur fiche la paix.

Fin de la politique, ennui de la politique…
Lettre à Bérénice :
A propos de l’agitation très médiatisée du cosmos démocrate … entendu sur les Ondes les considérations suivantes :
-la politique contemporaine vaudrait pour < évacuation du tragique > ( sic ).
-Dans les démocraties à économie de marché, l’unique préoccupation serait d’ élever la productivité du travail et d’ajuster la répartition dans l intérêt des classes moyennes hypertrophiées qui les constituent. La < figure du losange > se substituant à la < figure du triangle >, le < ventre mou > de la < société civile > ferait loi et un petit nombre de < très riches > cotoieraient un petit nombre de < très pauvres >.
La politique étant par ailleurs de plus en plus subordonnée à l’économie politique, les programmes des partis et autres différents acteurs de la chose publique seraient en conséquence fort proches et les réformes proposées ne susciteraient qu’ un notable désintérêt. Quant aux promesses plus substantielles, elles ne rencontreraient que sourires et incrédulité.
Les oligarques en place et en lice se heurteraient alors à un irréductible déficit de crédibilité…
Les malheureux se donnent pourtant bien de la peine pour attirer le chaland…
Effet probable de la conjoncture historique ? En l’absence de véritables menaces intérieures ou extérieures le désintérêt très réel pour des débats dénués d’enjeux semble quasi général.
Et voici donc venues les très riches heures de … l’Inspection des Phynances…
Ô Voiturin…
Quel pesant ennui que la politique !… Où sont donc allées légèreté, imagination, frivolité et utopie ?…

Marguerite Duras aux fourneaux
Extrait d’ une lettre d’Odile :
< … surpris par hasard une… savoureuse lecture archivée d’un texte célèbre de Marguerite Duras : < La soupe de poireaux-pommes de terre >. Par l’auteur (e).
Et sur quel ton !
Du < Nouveau roman > à la < Nouvelle cuisine >, un itinéraire donc…
Bien qu’à mon modeste goût, fort quintessenciés, l’un et l’autre manquent quelque peu de substance. >

Travail et libération de la femme.
Courriel à Charmante :

  1. … d’ une sociologue patentée, sorte de contemporaine < soeur-cherche >, cette proposition grandiloquente assénée comme une évidence : < les femmes ont conquis le travail comme outil de libération.>
    Cela est fort bien dit… J’ai songé immédiatement à Fontevraud et à sa Règle…
    Ayant désormais < droit au chapitre >, reconnues enfin dans leur < dignité > et pour la plupart d’entre-elles dûment prolétarisées ou fonctionnarisées, toutes ces saintes femmes vouées au labeur et à la mission auront ainsi conservé intacte… leur vertu.
    C’est cela le progrès des moeurs…
  2. Potins… Agitation dans le milieu ubuniversitaire… Grande campagne et diverses clameurs contre certains supposés mandarins harceleurs de quelques nymphes éplorées doctorantes ( sic ).
    Les marques d’attention se feraient trop précises, les mains de ces doctes s’égareraient, et les carrières d’un certain nombre d’ infortunées Justines se décideraient dans les boudoirs…
    Dilemme : de l’avancement ou de la vertu, il leur faudra choisir.
  3. Rencontré dans l’Histoire de Michelet cette définition du Siècle des Valois : < le siècle des braguettes >.
    Image qui m’a laissée songeuse…
  4. Cette maxime ‘patasophique : < Ne prions pas. Priapons >.

Courriel à Odile :
< … A propos de la mort et de ses rapports,
ces deux textes de Callimaque ( Anthologie Palatine ) :

  1. Sur la tombe de Timon le Misanthrope :
    -eh bien, Timon ?
    –C’est pis. Ô tourbe délétère !
    L’Hadès est plus peuplé que ne l’était la terre.
  2. Dialogue d’un mort et d’un vivant :
    -Que veux-tu ?
    -Savoir.
    -Quoi ?
    -Dans le royaume sombre, que voit-on ?
    -Rien.
    -Quoi, rien, Cerbère ?…
    -Fariboles, pas de Cerbère.
    -Et le Nocher et les oboles qu’on lui doit ?
    -Pas de Charon, Pas d’Achéron.
    -Et le Juge ?…
    -Pas de Minos. Rien; la mort…Mais si tu veux de moi un mot de réconfort : Plus de souci d’argent quand on n’ est plus qu’une Ombre. >

Sous le sable
D’ Odile :
Sous le sable, drame mélancolique doux-amer où Charlotte Rampling tient le rôle principal.
Cette scène agréable : pendant l’étreinte, à la remarque ambiguë de la femme qui vient de perdre son mari -< que vous êtes léger… > -, stupeur comique de l’amant d’ occasion dont la réplique traduit toute la naïve vanité de < coq perché dessus > : < -c’est la première fois qu’ on me dit ça !…

Claude Bessy contre la France du Père Ubu…
A Pervenche :
Il paraît, au dire des gazettes, que la Directrice de l’Ecole de danse de l’Opéra de Paris fulmine < contre la France du Père Ubu >…
Soulignant les conséquences de la fonctionnarisation de la culture, la pesanteur des règlements, la saga du Diplôme d’Etat pour l’enseignement, Claude Bessy fulmine :
< Je viens de recevoir diverses circulaires : l’une selon laquelle les professeurs de danse ne s’appellent plus professeurs mais < testeurs > ; l’autre qui explique qu’au nom de la < kinésiologie > dont vient de s’enticher le Ministère, il ne faut plus dire à un enfant < ne cambre pas le bassin> mais < descends tes ischions >.
Interrogée sur ses projets elle confie : < J’ai des projets, mais quand je les soumets, ici, on me regarde comme un dinosaure. J’irai donc peut-être en Australie tant la France m’exaspère. >
Et enfin cette chute qui me ravit : <Et si je m’ennuie, je ferai de l’humanitaire!>

Un mot de Jean Paul 2…
Courriel de Solange :
De Jean Paul, pataphysicien sans apostrophe, Pape et humoriste, à l’occasion de la Pâque romaine : < Salut à toi Jérusalem, Cité aimée du Seigneur. >
En effet…

En relisant Plutarque et Platon :
Que l’ordre social soit fondé sur la haine, que la société soit une machine à exclure et que, -contrairement à la vision idyllique des théoriciens démocrates modernes de la chose politique -, l’égalité, loin d’être une donnée de la nature, soit un artifice d’initiation et de sélection des oligarques, nuls plus que Lycurgue et que Platon, ces théoriciens auroraux du totalitarisme, ne le surent -quand ils ne mirent pas ces principes en pratique.
Ainsi l’horreur civile a-t-elle été théorisée par Platon dans sa République.
Sur le modèle de Sparte, il y expose la communauté des biens, la communauté des femmes et l’élevage en commun des enfants.
Lacédémone… Culte de la puissance, guerre perpétuelle contre les autres cités-états, terrorisme institutionnel à l’égard des ilotes, climat de peur entretenu en permanence, délation, persécution systématique des rares individualités se risquant à la contestation, prohibition des arts, du luxe et de la parole, et en conséquence le fameux < laconisme >.
Quant aux jeunes filles, contraintes à se soumettre nues à la fureur gymnique, sodomisées rituellement avant le mariage, soumises à l’impératif de l’utilité elles sont vouées aux rencontres brèves avec des époux qu’elles n’aimeront pas, qu’ elles ne connaîtront pas, leurs enfants leur étant enlevés à la naissance, pris en charge par l’Etat cannibale, ses nourrices et ses fonctionnaires.
Le tout sous le regard ophidien des Ephores.
Acmé et archétype métahistorique de la rage totalitaire et communautaire.
La société est tout ; tu n’es rien.
Lycurgue, Platon : lointains modèles des fabricateurs récurrents de « projet de société », des « réformistes » et des « refondateurs », des  » sociologues  » et autres spécialistes du contrôle social, les maniaques de la  » santé publique »…
Que nous sommes éloignées des ferveurs de Lesbos…

Tirésias, la femme et son secret.
Courriel de Solange :
… Zeus et Héra se querellaient. Le motif du différend ? savoir qui de l’homme ou de la femme éprouve le plus grand plaisir dans l’amour. Ils consultèrent Tirésias, le tueur de serpents. Lui seul avait fait la double expérience. Il répondit sans hésiter que si la jouissance d’amour se composait de dix parties, neuf en revenaient à la femme, et une seule à l’homme.
Héra, furieuse de voir révélé le secret de son sexe, frappa Tirésias de cécité.
Zeus, afin de réparer le tort, lui accorda le don de prophétie…
Où est l’inavouable ? Quel est le secret ?… Toucherait-on là à un tabou ?
C’est que peut-être la femme, par ailleurs maîtresse des simulacres, jouirait d’une manière d’autosuffisance érotique inconnue des hommes qui en seraient exclus…
D’où, quand il ne s’agit pas de brutes ou d’innocents, leur perplexité et leur dépit…
Dans le climat de la rivalité des sexes il est des choses qu’il vaut mieux taire. On n’approche pas sans précaution l’énigme de la féminité… Par quoi il faudra comprendre l’attitude de la déesse.

Lesbianisme et < identité culturelle >…
Au courrier, de Bérénice :
… Un enfant est né. Un petit garçon. Il se nomme Gauvin. Particularité : il n’entend rien de l’oreille gauche et très peu de l’oreille droite. Il a deux < mères > : Sharon et Candace. Deux lesbiennes made in USA.
Sourdes de naissance.
Pour la conception, Sharon a dû ravaler ses principes et solliciter un ami, sourd lui aussi.
C’est au nom de leur < identité culturelle > revendiquée que les deux femmes ont expliqué leur projet : être malentendant ne serait pas un handicap mais un « héritage » ( sic ) … >
La belle expression < communautariste > du principe de raison suffisante…
Mais à cultiver l’horreur, pourquoi ne pas aller plus loin dans la geste idéologique et… ne pas fabriquer des estropiés ?

Horreur astronomique.
Je prends connaissance de cette information stupéfiante… < Notre galaxie compterait un milliard de planètes comme la Terre > !
Et qui pourraient abriter la vie !
Ce sont les chercheurs de l’Open University qui ont mis au point un nouveau modèle de simulation sur ordinateur permettant d’estimer le nombre de systèmes solaires susceptibles d’abriter des planètes semblables à la nôtre notamment par leur humidité et leur température.
Merveilleux ouvoir d’astronomie potentielle…
Le système de calcul projette des « Terres  » hypothétiques en orbite dans des espaces à température modérée pouvant permettre la vie humaine, sur le modèle de la zone Goldlocks ( boucles d’or ) qui s’étend de l’orbite de Vénus à celle de Mars.
Il établit ensuite dans quelle mesure ces planètes semblables à la Terre sont susceptibles d’être éjectées par les champs de gravitation de planètes voisines plus importantes.
Le système solaire connu comme étant jusqu’à présent le plus proche du nôtre est « Ursae Majoris 47 « , une étoile guère plus vieille que le soleil. A 51 années lumières de la Terre. Deux planètes géantes y auraient été détectées…
< Ce système solaire vaut la peine d’être exploré car il abrite peut-être de la vie >, affirme avec enthousiasme le professeur Barrie Jones.
Effectivement, on imagine les avatars… de la lutte pour la vie et les péripéties de l’ Histoire universelle (sic) avec toutes leurs variantes paradisiaques et luxuriantes -parasitismes, exploitations, assassinats, tueries, massacres, génocides inter et intraspécifiques -, à l’échelle de la Galaxie et reproduites à un milliard d’exemplaires…
De quoi nourrir l’euphorie et entonner le célèbre cantique < Tout l’univers est plein de Sa Magnificence >…
De quoi donner du grain à moudre à la Science… et alimenter le fétichisme vitaliste des Prêtres, les fantasmes éducationnistes des Moralistes, des Philosophes et des Juristes…
Qui sait… peut-être pourrait-on même envoyer à ces lointains cousins et supposées cousines quelques missions humanitaires…

Horreur orthographique.
Courriel d’Odile :
La mode semble être au barbarisme et au néologisme… professeure, ingénieure, auteure, docteure, proviseure, procureure, rapporteure, réviseure, etc.
Effet sans doute de la féminisation rageuse de l’orthographe… Ainsi ces plaisantes et pédantes < absurdités > que sont chercheure, instituteure, alors que les féminins réguliers correspondants existent, chercheuse, institutrice…
Le féminisme impénitent n’a pas de limites : agente, cheffe -Ô les couvre-cheffes !-, maîtresse ( sic ) de conférence -pour nouvelle grammairienne SM ?-, écrivaine -ravissant mot valise-, autrice…
Aimables monstruosités lexicales qui entretiennent disputes et polémiques.
< L’oreille autant que l’intelligence grammaticale devraient prévenir contre de telles aberrations >, proteste l’Académie dont la Commission générale de terminologie et de néologie déplore les < dommages > que l’ignorance du rôle des agents grammaticaux < inflige à la langue française >.
Il se peut.
Encore qu’à l’écart du Docte et du Bas Bleu la ‘pataphysicienne puisse déceler dans ce Bormarzo lexical un penchant très singulier… à la perversion.

Perles travaillistes…
Relevé dans la profession de foi d’un candidat affiché en rose aux élections présidentielles poldaves :
< -nous continuerons à promouvoir une société du travail… -développer la formation tout au long de la vie… le progrès des techniques, la compétition entre les entreprises, la mobilité des personnes bouleversent la vie professionnelle… chacun doit pouvoir participer à ces changements… C’est pourquoi la formation tout au long de la vie sera l’un des objectifs majeurs du quinquennat. -il me paraît indispensable que nous changions nos attitudes collectives à l’égard des plus de 50 ans, notamment en mettant fin aux discriminations à l’encontre des travailleurs âgés et à leur mise à l’écart précoce par les employeurs. >
Ces « propositions  » auxquelles vient s’ajouter la récente « avancée » (sic) du < droit au travail de nuit > à l’usage de nos soeurettes en mal d’enfant, me rappelle la célèbre et très poétique définition de la femme selon Joseph Staline dans son fameux Traité d’Economie politique: < la femme, première force productive de l’ Etat des Travailleurs >…
< Démocratie sociale-libérale >, société travailliste de contrôle, variante euphémisée parpaillote de feu le stalinisme soviétique.

Au Lycée Henri 4…
De Charmante :
… Emoi des familles au Lycée Henri 4 et à Saint Etienne du Mont… Le proviseur de ce temple de < l’ élitisme républicain > (sic) a dû interdire un journal lycéen, Ravaillac, au titre véritablement scandaleux et provocateur :
< Du cul, du cul, du cul >.
D’autant plus que la page de couverture montrait trois jeunes hommes et deux jeunes femmes, élèves en terminale et classe préparatoire, posant nus, le sexe dissimulé sous une bande de rubant adhésif opaque mais amovible !
Le très responsable et très puritain Syndicat des proviseurs de l’Education nationale n’a pas manqué d’apporter son soutien au chef d’établissement en dénonçant un journal à < caractère pornographique > (sic).
Le dévoiement de la jeunesse est intolérable…

Un homme qui aimait les femmes.
Au Courrier, d’Odile :
… consacré une petite heure à l’ exposition des photos de Jean-François Jonvelle, galerie Acte 2… Intimité, simplicité, gestes féminins furtifs ; un regard, un climat…

Du jeu des Olympiens. Séduire Nécessité. Hélène ou Platon ?
A Odile ( reprise ) :
< Pour quelle raison les Olympiens ont-ils préféré la ceinture de la tromperie au serpent de la nécessité ? > , demande Roberto Calasso.
C’est qu’ < ils cherchaient une existence bariolée qui eût plus de jeu >.
La terre et les mortels deviennent alors matière de leur caprice, de leurs intrigues, de leurs… < écarts >.
< Par delà le bien et le mal >, -à entendre ces mots au sens chrétien, après le renversement des valeurs opéré par l’Orphisme, les Pythagoriciens et la philosophie platonicienne.
Se libérer des liens… Il fallait pour cela séduire Ananké, engendrer Hélène pour permettre enfin le divertissement suprême, la guerre.
La guerre comme spectacle. Offert à l’avidité des Dieux.
Révolte de la < frivolité > contre la pesanteur de l’Ordre, la rigueur de la Loi, la tyrannie de Cronos.
Troie…
< Athéna et Apollon à l’arc argenté, semblables aux vautours, se posèrent sur le haut chêne de Zeus qui tient l’égide, et jouirent du spectacle des hommes, assis en rangs serrés, tandis qu’un frisson agitait les boucliers, les javelots, les casques >, écrit Homère.
Eris, la Querelle, accompagnée d’Enyo, le Cri de guerre, règnent sur < le tumulte impudent du massacre >.
Et pour quel motif la dispute ?
Pour la beauté, pour l’apparence, pour le simulacre… pour deux femmes : Hélène et Briséis < aux belles joues >… kallipareos.
< L’apparition d’Hélène marque le moment d’équilibre instable, fuyant, où la nécessité et la beauté se sont superposées, grâce à l’astuce traîtresse de Zeus. Le viol de Némésis fut, pour Zeus l’extrême hasard théologique de son règne. >
L’extrême < hasard > théologique…

Dans la représentation d’ Homère la beauté absorbe la bonté, dans l’ éblouissement des belles armes et la fureur du corps à corps.
Dans l’éclat et la splendeur.
Et ce n’est que bien après la fin du temps des Héros que surviendra le temps de la philosophie, c’est-à-dire le déclin de la vision tragique et la définitive subordination du Beau au < Bien >, de l’apparence à l’essence, du simulacre au Sens.
La dialectique recouvrira l’hexamètre. Définitivement.
Le Clerc aura vaincu le Guerrier et réduit au silence le Poète.

Dogme et < virginité consacrée >.
Courriel de Bérénice.
Perle :
Entendu sur les Ondes, d’un journaliste catholique autorisé : < Le dogme, ce n’est pas ce qui interdit la pensée, mais ce qui donne beaucoup à penser…>

  1. Le dogme serait donc < ce qui fait sens >, une < puissance de grâce et de salut >.
    Paradoxe stupéfiant !
    Proposition scandaleuse du point de vue des Lumières certes, mais… qui ne manque pas de pertinence du point de vue de la ‘pataphysique.
    Ainsi celui de la < virginité consacrée >, occasion, nous dit-on, d’ une < formidable libération> et aussi d’ une < nouvelle herméneutique du corps > …
    Et qui, joint à < l’ obligation de chasteté > des prêtres, s’opposa à < l’ indistinction incestueuse de la sexualité antique >.
  2. En conséquence, à suivre le fil de cette logique, d’Achille ou de saint Augustin, d’ Hélène ou… de la Vierge Marie il faudrait donc choisir.

Troie. Palamède et la ‘pataphysique.
A Odile.
< Dans une stupide plaine d’Asie les guerriers avaient dressé leurs baraquements et regardaient l’horizon. Il n’y avait pas de femmes et même les amours masculines pouvaient lasser. Au cours de ces nombreuses années, ils avaient eu une seule aide précieuse : un homme comme eux, un guerrier, Palamède, leur avait appris à jouer aux dés, aux dames, aux osselets… dans le sanctuaire de Tyché, à Argos, il dédia les dés qu’il avait inventés. Tyché était une divinité alors peu fréquentée. Mais un jour, tous reconnaîtraient en elle l’image la plus proche de la nature. Si la vie se dépouille de tout, il reste le corps de la fortune. Ce qui arrive c’est le heurt continu de dés lancés. Cette image se fixa un jour dans les pensées et elle ne fut jamais supplantée. Palamède était le seul devant Troie qui l’eût reconnue… >
Roberto Calasso, Les noces de Cadmos et Harmonie.
Homère, Lucrèce, Nietzsche, Mallarmé, Valéry et la ‘pataphysique…

Du cosmopolitisme ‘pataphysique.
Du point de vue ‘pataphysique le cosmopolitisme peut être caractérisé de la manière suivante :
-n’être citoyen d’aucun Etat -à la manière des Cyniques ( Cratès ) et des Stoïciens de l’Antiquité ( Zénon ) pour lesquels les préjugés et les coutumes de tel ou tel pays empêcheraient de < penser rationnellement >.
-ne pas se considérer comme < habitant du monde > et < philanthrope > à la manière des Philosophes du 18° siècle.
-ne pas participer au commerce des idées et des biens en multipliant les échanges économiques, politiques et culturels afin de susciter une < manière libérale de penser >.
-Le cosmopolitisme ‘pataphysique n’est pas un principe politique qui détermine l’intérêt pris, voire la participation, à la prétendue < liberté des peuples et des Etats >.
-il n’est pas un principe latéral et transversal qui lie les citoyens de chaque Etat autour de l’expérience de la liberté et qui en ferait < les citoyens d’une République universelle possible > à la manière de Kant.
La ‘pataphysicienne est une femme apatride et acosmique, voyageuse qui se moque des frontières comme de la possession ou de la privation de < droits garantis par un Etat >.
Elle n’est pas non plus assujettie aux droits-de-l’homme prétendument universels.
Elle est un être privé, anhistorique et curieuse.
C’est cela le kunisme ‘pataphysique. Une bien scandaleuse histoire…
( Sur ce point voir : Un Chevalier, un Diable, la Mort.)

Deux fragments de l’idéalisme magique, de l’herméneutique et de l’occultisme jüngeriens.
 

  1. < Il ( Carl Schmitt ) est vraiment du petit nombre de ceux qui cherchent à évaluer les faits selon des catégories qui ne soient pas complètement erronées, comme les catégories nationales, sociales, économiques… … La vision qu’Ezéchiel décrit au début de son livre, contient une vue d’un ordre suprême, un aperçu sur la construction secrète du monde. Cela dépasse les philosophes les plus audacieux, la plus belle réalisation de l’art. Ici, nous pénétrons dans la sphère des données immédiates que l’extase fait découvrir. Ainsi se révèle pour les hauts créateurs, la splendeur irisée du monde et de ses mondes supérieurs -sous une apparence sensible et tangible. >
    2 .< … Le soir, promenade à travers Dahlem plongé dans l’obscurité ; en cours de route nous parlâmes des mots d’ordre des Frères Moraves, des Quatrains de Nostradamus, d’Isaïe et des prophéties en général. Le fait que des prophéties se réalisent, et cela dans les espaces de temps les plus divers, est justement le signe auquel on reconnaît la singulière puissance prophétique de la vision. Dans le cours des temps, ce que le prophète a vu dans les éléments se répète d’une façon kaléidoscopique. Son regard ne se pose pas sur l’histoire, mais sur la substance, non point sur l’avenir mais sur la loi. C’est pourquoi la simple connaissance de dates futures et de futures conjonctions passe avec juste raison pour un signe d’intelligence malsaine ou de basse magie. >
    Journal de guerre, 15.11.1942.

Perles…
Au salon, en parcourant les gazettes, à l’occasion d’un « balayage »…

  1. De Blandine Kriegel, philosophe, professeur de philosophie morale et politique, cette profession de foi :
    < … une communauté politique est en proie à la finitude et a besoin d’être défendue. Fustel de Coulanges avait raison contre les nationalistes allemands : il faut penser jusqu’au bout la finitude des nations, et cette finitude suppose qu’un contrat renouvelle, à chaque génération, le < génie > de la nation. L’héritage et le contrat : il faut donc tenir les deux ensemble…. Je crois aux capacités de la France, à son avenir, à sa grandeur aussi -à sa grandeur de nation d’accueil-, je suis une patriote française. >
  2. Ce bref dialogue et cette remarque acide de Simone de Beauvoir rapportés par Germaine Sorbets, secrétaire de Sartre :
    < -Germaine : < Mon petit-fils vient de naître, je suis grand-mère.>
    –Simone de Beauvoir : <Je me demandais pourquoi vous sentiez le pipi.>

Robert Musil. De la ville ou du principe de raison… insuffisante.
< … Comme toutes les grandes villes, elle était faite d’irrégularité et de changement, de choses et d’affaires glissant l’une devant l’autre, refusant de marcher au pas, s’entrechoquant ; intervalles de silence, voies de passage et amples pulsations rythmiques, éternelle dissonance, éternel déséquilibre des rythmes ; en gros, une sorte de liquide en ébullition dans quelque récipient fait de la substance durable des maisons, des lois, des prescriptions et des traditions historiques. >
L’ homme sans qualités, 1.

Béatitude : < l ‘abolition des censures permet de refaire l’Histoire. >
Rencontré dans une gazette, d’Alain Finkielkraut, philosophe, à propos du livre de Thierry Meyssan, L’effroyable imposture, soutenant deux thèses jugées scandaleuses –

  1. qu’aucun avion ne se serait écrasé sur le Pentagone le 11 septembre 2001.
  2. que les U.S.A seraient devenus une théocratie impérialiste autoritaire entre les mains de pétroliers texans :
    < … l’abolition des censures permet de refaire l’Histoire… Internet est à la fois le paradis des rumeurs et l’Eden des Droits de l’homme. Tous les discours sont égaux et tout le monde est libre de dire n’importe quoi… il s’agit en fait d’une inquiétante régression… Si l’anarchie du Net règne sur le livre, alors il y aura de plus en plus de livres, mais c’en sera fini du Livre… Chacun tend à produire ses propres critères pour sélectionner l’ information. Cela s’appelle l’histoire à la carte. Il n’y a plus de principe de réalité et donc il n’y aura bientôt plus de monde commun. Effroyable dérive. >
    En somme, à suivre le diagnostic affligé du « philosophe », -et sans doute afin d’ éviter la < Défaite de la pensée > -, il urgerait de constituer un Comité de lecture international à compétence universelle, un C.L.I, pour réduire le vaste domaine de la pataphysique et de la Chimère à ce qu’ une < Censure raisonnée > pourrait seule autoriser selon ses canons et ses normes…
    C’est cela < la pensée progressiste >…

Virginie Despentes chez Guy Debord.
Courriel, de Bérénice :
A propos de TV, cette reprise aux accents moralisants par Virginie Despentes de la critique post-situationniste de la < société du spectacle > ( Teen Spirit ):
< … Jamais propagande n’avait été mieux dispensée, et jamais propagande n’avait connu pareil cynisme. Même dans les pires bourrages de crâne, staliniens, hitlériens, sionistes ou palestiniens, catholiques ou scientologues, les professeurs avaient été eux-mêmes formatés, et croyaient en ce qu’ils dispensaient. On n’en était plus là, les directeurs de chaînes, les réalisateurs de clips, les producteurs de groupes, les cadres marketing, tous savaient pertinemment qu’ils escroquaient des innocents. Ils se croyaient modernes et durs, se comparant volontiers à de grands animaux féroces. Alors que c’était qu’un tas de corniauds voulant tous faire plaisir au chef, recevoir la petite caresse d’approbation. >
Prose intéressante… Topos éthique et pathos semblables à ceux du situationnisme des années soixante… Critique du < simulacre >, nostalgie de < l’innocence > ; aversion pour le réalisme cynique inhérent à l’âpreté de la lutte pour l’existence économique… Vulgarité affectée ( ? ) et méprisante de l’expression… Colère et indignation.
L’effort de diagnostic est mêlé de jugements de valeur ; la mentalité fleur bleue perce sous les reliquats de la prose < trash >…

Socialisme et utopie informatique, selon Pierre Lévy.
Béatitude…
A propos du rêve d’ évasion de la « société du spectacle « , cette utopie de Pierre Lévy, L ‘ intelligence collective, 1995.
< …Le rôle de l’informatique et des techniques de communication à support numérique ne serait pas de « remplacer l’homme » ni de s’approcher d’une hypothétique intelligence artificielle, mais de favoriser la construction de collectifs intelligents où les potentialités sociales et cognitives de chacun pourront se développer et s’amplifier mutuellement. Selon cette approche, le projet architectural majeur du 21°siècle sera d’imaginer de construire et d’aménager l’espace interactif et mouvant du cyberspace. Peut-être alors sera-t-il possible de dépasser la société du spectacle pour aborder une ère post-médias, ère dans laquelle les techniques de communication serviront à filtrer les flux de connaissances, à naviguer dans le savoir et à penser ensemble plutôt qu’à charrier des masses d’informations. >
Tel serait donc le nouveau paradigme du paradis communiste, transparent, sans ombres, unanimiste, sans dissidences, cognitif, informé, la < cybersociété> ou nouvelle cité radieuse du < collectif numérique > et du < penser ensemble >. Enième version d’un genre littéraire pourtant bien fatigué.
Vision communautariste, vision religieuse, vision totalitaire, vision d’épouvante…

De la ‘pataphysique.
D’après Pervenche il existerait en Italie une nouvelle école de plasticiens ; école nommée, paraît-il, < vidutiste >. Les peintres se donneraient pour propos de fixer la banalité…
La ‘pataphysicienne, qui se divertit à recueillir quelques unes des béatitudes, perles et autres visions de son temps, serait-elle à sa manière… < vidutiste > ?

La curiosité selon La Bruyère.
Au hasard de la lecture j’ai relevé cette réflexion:
< … La curiosité n’est pas un goût pour ce qui est bon ou pour ce qui est beau, mais pour ce qui est rare, unique, pour ce qu’on a et que les autres n’ont point… > ( Caractères,13 ).

Le Shakespeare nouveau de Jean-Michel Déprats.
A propos de la sortie des deux volumes bilingues des tragédies de W. Shakespeare sous la direction de Jean-Michel Déprats, cet extrait quasi-‘pataphysique d’une chronique de Pierre Marcabru :
< … Shakespeare reste un inconnu qu’on questionne et qu’on traduit sans cesse. Marxistes, structuralistes, freudiens, ésotéristes, linguistes, commentateurs de tous poils sont à son chevet et le tourmentent comme seuls les professeurs savent tourmenter. Mais Shakespeare, qui est un cancre, s’en moque et continue d’appeler un chat un chat et de montrer à qui veut le voir le roi tout nu. Qu’il s’agisse d’amour et de politique, de passion ou d’intérêt, il casse le morceau avec délice, il vend la mèche, il dit tout sur tout, et parfois son contraire, mais il a un oeil, celui de Montaigne et de Machiavel. Il débarbouille l’idéalisme. Il expose l’Histoire telle qu’elle se fait, les histoires telles qu’elles se font. Il donne des clefs et, comme les serrures n’ont pas changé, ces clefs sont toujours bonnes à prendre… >
Donc, par-delà l’ herméneutique et la glose, le texte, nu…
Qu’ ajouter de plus ?… Tout est dit.

La soif du martyre.
Courriel de Solange :
… ce plaisant extrait d’ une étude de G.W.Bowersock, Rome et le martyre.
< Un gouverneur romain de la province d’Asie vaquait à ses activités judiciaires ordinaires ( Sous Commode, vers 180 ) >. Surgit tout un peuple d’excités se proclamant chrétiens, < … pieuse populace, encourageant le gouverneur à accomplir son devoir et à les vouer tous sans délai à la mort… >.
Conseil du gouverneur excédé : < Malheureux! Si vous voulez mourir, vous avez des falaises et des cordes pour vous pendre. >
Quand je pense à la réputation d’inhumanité que des siècles de propagande chrétienne ont tressée aux hauts fonctionnaires de Rome… Il est vrai que ces esprits prosaïques n’avaient pas le sens du sublime : subir le martyre sans provocation et se déclarer < témoin > devant tous les hommes des souffrances de Jésus le Christ et de sa < résurrection >…
Cet exhibitionnisme aura sans doute choqué leur goût…

Péronnelles…
Courriel, d’Odile.
Sur les Ondes de la Culture ( sic), quotidien défilé d’Oracles à jupons!… ton, assurance, égrenant sur tous sujets les litanies de leur bonne conscience et de leur conformisme…
Un qualificatif par ailleurs tout à fait approprié à quelques bas bleus de ministères poldaves, pontifiantes, moralisantes, indiscrètes, insistantes et citoyennes : < péronnelles >.
Définition de Littré : < jeunes femmes sottes et babillardes >.

Christianisme soft et conception tragique de la vie.
Courriel, de Pervenche.
Sur les Ondes : A l’occasion de l’émotion politique qui semble présentement énerver les esprits et secouer la Poldavie, intéressante < tribune des religions > réunissant divers représentants des confessions du < Livre >.
Ces événements semblent en effet agir comme un révélateur…
Florilège. Il convient de s’opposer à un discours et à des thèses :
-qui se recommandent de… Bernanos (sic).
-qui expriment < la tentation du mal présente en chacun d’entre nous >.
-qui incarnent l’esprit du paganisme -l’idée de < préférence > et la préférence des affections étant contraires au message universaliste du Christianisme.
< Le Chrétien n’a pas besoin de sauveur, rappelle en outre un vaillant Jésuite ; son Sauveur c’est Jésus de Nazareth. Il faut néanmoins réinvestir la politique concrète. >
Le bon Père…
Mais qui ne voit, à travers de tels propos, ce qui sépare ces boys scouts du christianisme social et démocratique de la lettre des Evangiles, savoir le pessimisme fondamental et irréductible lié à la reconnaissance du caractère tragique de la vie. ( cf : saint Augustin, Pascal, Barbey, Bernanos, Mauriac, Bresson etc… )
Décidément le réel ne passe toujours pas.
Note :
Relire Aristote, Ethique à Nicomaque, Livre 9. Notamment les analyses de l’ abominable idée de < préférence > comme origine de l’amitié, source de l’hospitalité et fondement de l’ existence politique…

Les Mégapatagons, une utopie de Restif de la Bretonne.
Courriel, de Pervenche.
On sait que Restif, visionnaire, fut l’un des producteurs les plus féconds d’utopies…
Ainsi l’Andrographe décrit-il par le détail un projet pour < opérer une réforme générale des moeurs, et, par elle, le bonheur du genre humain>. Réforme audacieuse et conservatrice qui a peut-être inspiré Proudhon…
Antiféministe, il interdit l’écriture et la lecture aux femmes !… Il instaure la communauté des biens et propose une vision de la société dégagée de l’ < égoïsme individuel et professionnel >.
Un autre texte réglemente minutieusement l’activité des filles publiques. Elles sont logées dans un… Parthénion, surveillées par un Conseil de douze citoyens et < guidées selon la raison et l’humanité >.
Parmi ces élucubrations romanesques, la description du pays des < Mégapatagons > ou < La Découverte australe par un homme volant >, datée de 1782, prend pour la ‘pataphysicienne un relief tout particulier… Il s’agit d’ une utopie à tiroirs, sociale, scientifique et cosmique. < Noffub > ( Buffon) est l’autorité de référence, le grand sage de ce continent.
Les patagons sont des géants dont la durée moyenne de vie est de cent cinquante ans. Leurs moeurs sont aux antipodes des usages habituels, comme leur pays. Les institutions sont communistes et égalitaires. La fraternité qui leur est habituelle a réduit les institutions au minimum.
Cette curiosité enfin : dans une île voisine il est prescrit à tout homme, à seize ans d’épouser une femme de trente deux ans. Après seize ans de mariage il divorce et épouse une jeune fille qu’il garde jusqu’à ce qu’elle atteigne l’âge de trente deux ans…

Une question embarrassante…
De Charmante, cet angoissant ‘patakoan digne d’une épreuve de Concours général de pataphilosophie :
Suffit-il de se dire < démocrate > et < antifasciste > pour n’être pas totalitaire?

Du prétendu irénisme féminin.
D’ Odile cette remarque.
En relisant les notes de Marguerite Yourcenar sur Aristophane, je rencontre ce passage :
< Dans Lysistrata, écrite en 412, jouée peu après ( la perte de la flotte d’Athènes lors de l’expédition de Sicile ), Aristophane répond à ce désastre par la proposition bouffonne de faire cesser la guerre par une grève conjugale des femmes, beau projet jamais réalisé jusqu’ici, puisque le goût féminin de l’uniforme a au contraire contribué de tout temps à faire du monde un charnier. >

Schizophrénie.
Une ‘pataphysicienne à sa fenêtre :
Cette réflexion : un certain nombre de nos contemporains évoluent dans un état mental proche de la schizophrénie. Ils vivent dans un univers politique qu’ils ne cessent d’appréhender au moyen de concepts moraux.
C’est là jouer aux échecs en appliquant les règles du jeu de dames ; et c’est de surcroît prendre au sérieux des < valeurs > tout juste dignes de parodie…

Les < droits de l’homme > contre la mort choisie.
Courriel, de Bérénice.
Perle.
La Cour européenne des droits de l’homme (sic) a refusé à Diane Pretty le droit d’abréger ses souffrances en se suicidant avec l’aide de son époux. Cette Britannique de quarante-trois ans, paralysée, atteinte d’une maladie incurable, voulait être sûre que son mari ne serait pas poursuivi.
Bertrand Russell, logicien, philosophe, Prix Nobel de littérature, remarquait jadis ( Essais sceptiques ) que le kantien n’aime pas les hommes mais qu’ il leur préfère… la < Loi >.
Ce que cette décision des < Magistrats > de la nouvelle Europe kantienne semble confirmer publiquement…

Ton sur ton…

  1. Parution de Femmes amoureuses de Lawrence, dans l’intégrité de son texte, restauré de l’intégrité des passages jugés « pornographiques » par la censure anglaise lors des premières publications.
    A recommander à Charmante.
  2. Ce mot de Raymond Aron sur les hégéliens, Sartre et quelques autres : < les confidents de la providence >. Et les exécuteurs de ses basses oeuvres…
    Epithète à appliquer à nos < danseurs contemporains >…
  3. Sur le Bonheur, cette période à dessein critique, de S. Lapaque, Mythologie française :
    < Le bonheur ? Un drap de bain Hermès, un boxer-short Vilebrequin, des lunettes noires Armani, un sac à dos griffé Cerrutti, un bermuda Old England, une chemise Ralph Lauren, une paire de vieux mocassins Weston, un tube de crème solaire Dior… >
    Sans doute est-ce là un bonheur de simulacres, un bonheur a minima.
    Mais a-t-on vraiment < autre chose > à proposer ?…

Violence et Jeunesse…
Au courrier, de Solange.
< Pourquoi la jeunesse est-elle violente ? >, s’ interrogent doctement éditorialistes, politiques, médecins, criminalistes, enseignants, psychologues et autres animateurs culturels…
Et l’ un d’entre eux, navré, de convoquer… Hésiode, Les travaux et les jours :
< Je n’ai plus aucun espoir pour l’avenir de notre pays si la jeunesse d’aujourd’hui prend le commandement demain. Parce que cette jeunesse est insupportable, sans retenue, simplement terrible… Notre monde atteint un stade critique. Les enfants n’écoutent plus leurs parents. La fin du monde ne peut être loin >.
Antienne reprise quelques siècles plus tard par le vieux Platon dans ses Lois ( -347)….
-Pourquoi cette violence ?
Une réponse possible : parce qu’elle est l’expression spontanée de … la jeunesse.
Tout simplement.
Et que la < turbulence > est le coeur de la vie. ( Sur ce point voir Lucrèce et la théorie moderne du chaos ).
Aussi déplaisante qu’elle apparaisse à tous les installés, les apeurés de l’existence et de la rente qui tremblent pour leur situation, leur charges, leurs dignités, leurs prébendes, leurs subventions…
Quant à moi, à l’instar d’Hélène, je ne dissimule pas l’attrait qu’ exercent sur mes sens l’ énergie, la vigueur, la santé, la force…
Tout l’art est de savoir les apprivoiser. D’où naîtra éventuellement la beauté -seule fin que je reconnaisse à l’existence.

Oedipe sans complexe.
De Danielle Jouanna, Notes sur l’Oedipe Roi de Sophocle, cette critique de l’interprétation freudienne :
< … Freud ( dans La Naissance de la psychanalyse et dans ses Trois essais sur la théorie sexuelle ) analyse le trouble dans lequel nous plonge la pièce comme se rattachant aux régions obscures de notre inconscient, au désir refoulé de l’enfant désirant épouser sa mère et tuer le rival, c’est-à-dire le père : < Chaque spectateur fut un jour un Oedipe en germe, en imagination, il s’épouvante de voir la réalisation de son rêve transportée dans la vie .> C’est de l’analyse de Freud qu’est née l’idée du fameux < complexe d’Oedipe >.
… Mais Jean-Pierre Vernant fait remarquer avec bon sens, dans son article < Oedipe sans complexe >, qu’en tuant Laïos, Oedipe ignorait qu’il s’agissait de son père et ne souhaitait nullement épouser sa mère… >.
Avec  » bon sens « … C’est là toucher du doigt une loi plus générale : pour le critique, quelle que soit sa chapelle, le texte n’est jamais le texte. Il est… prétexte, matière à projection, à délire, à élucubrations, à fantaisies, à visions qui toutes nourrissent un même fétichisme du < sens >. Il faut combler le vide… de la lettre.
La lettre a horreur du vide…
Ainsi du freudisme, qui, à l’instar de toute idéologie, n’est que le vaste développement d’une pétition de principe.

Sur Lucien.
De Lucien Jerphagnon, Histoire de la Rome antique:
< … Lucien de Samosate… c’est un homme de la vieille école, classique, qu’agace prodigieusement la mode philosophaillante et superstitieuse de son temps. Cultivé et sarcastique, il s’amuse et nous amuse des faux mages, des faux philosophes, des faux prophètes de toutes sortes, qu’il rencontre à tous les coins de rue et qu’il taille en pièces dans une langue pleine de trouvailles… ce qui le déchaîne, c’est la prétention des gens à spéculer sur l’envers des choses et à vous délivrer le fin mot de l’au-delà. Démesure qu’il se plaît à dégonfler avec une ironie grinçante. Démasquer les charlatanismes, ruiner les préjugés, dissiper les illusions, garantir ainsi les hommes de bonne volonté contre les berlues et les pieuses arnaques : tel est le rôle qu’il se donne pour son plaisir et pour le nôtre. >
Au seuil de la ‘pataphysique donc…

La Vénus hottentote retrouve sa dignité en Afrique du Sud…
De Solange, cette < curiosité > touchante:
Agence ‘pataphysique de presse.
LE CAP (AFP), le 03-05-2002
La dépouille mortelle de Saartje Baartman, la « Vénus hottentote » , a retrouvé sa terre vendredi au Cap en provenance de France, un événement salué par les autorités sud-africaines comme le symbole d’une « décolonisation psychologique ».
Morte en 1816, la Vénus a été accueillie solennellement vendredi à l’aéroport international du Cap, après être arrivée le matin même à Johannesburg en provenance de l’aéroport de Paris Charles de Gaulle.
Des représentants de son peuple, les Khoïsan, ont accueilli le cercueil contenant ses restes, recouvert du drapeau sud-africain, par des chants et une minute de silence à l’aéroport.
« Ce n’est pas seulement la restauration de la dignité de notre soeur, mais de nous tous, peuple du tiers-monde », a dit la vice-ministre sud-africaine des Arts et de la Culture, Bridget Mabandla, lors d’une allocution.
La foule présente à l’aéroport a acclamé à son passage le cercueil contenant les restes de la Vénus – le squelette et des bocaux contenant le cerveau et les organes génitaux – tandis qu’un orchestre jouait de la musique traditionnelle.
« C’est très émouvant », a dit Stéphane Toulet, consul-adjoint de France au Cap, qui participait à la cérémonie.
Née en 1789, la jeune femme avait été emmenée en 1810 à Londres par un médecin de la marine britannique, qui l’avait convaincue qu’elle ferait fortune en montrant son corps aux Européens.
Elle fut en fait exhibée comme objet de curiosité sexuelle, en raison d’une morphologie propre à son ethnie marquée par un postérieur très saillant et une hypertrophie exceptionnelle des petites lèvres de la vulve.
Le Muséum d’histoire naturelle a réalisé un moulage de son corps et conservé le squelette, les organes génitaux et le cerveau, qui sont restés exposés jusqu’en 1974 au Musée de l’Homme.
Et j’ imagine un  » Jugement de Pâris », donné aux Enfers par Sandomir celui-là: Hélène, Marie, Vierge-mère et… la vénus hottentote… en un nouveau Concile d’amour…
Un beau spectacle ‘pataphysique, dans la manière de Panizza…

Fellini, à propos de Buster Keaton.
Note de lecture.
< … Keaton, lui, n’a pas recours au chantage aux sentiments : ses luttes et ses désastres ne sont pas vécus pour réparer des torts ou des injustices, ne visent pas à nous émouvoir ou à nous indigner. Son effort opiniâtre semble consister à nous suggérer un point de vue, une perspective complètement autre, presqu’une philosophie, une religion différente qui renverse et rend dérisoires et inutiles toutes les idées et les postulats gelés dans un système de concepts inaltérables : un être cocasse qui vient directement du bouddhisme Zen… Tout son comique est le comique des rêves, où l’allégorie, la légèreté, l’aspect bouffon sont vécus en profondeur, un énorme rire silencieux sur le contraste démesuré et impossible à résoudre entre nos points de vue et le mystère des choses. … Chez Buster keaton, j’ai toujours été frappé par la vision détachée, impartiale des choses, des hommes, de la vie, qui ne ressemble guère à celle de Charlot qui est sentimentale, romantique, parcourue par des signes de critique sociale. >
Fellini par Fellini. Entretiens avec Giovanni Grazzini.

Actualité du Sycophante…
Sycophante : du grec sukon, figue et phainein, faire voir. Nom donné à Athènes à ceux qui dénonçaient les exportateurs ou voleurs de figue ; puis, par extension, à ceux qui dénonçaient au peuple les citoyens éminents par leurs richesses et leurs vertus. ( Larousse et Littré ).
Ainsi, ce passage de Démosthène, Contre Aristogiton, 1, 52 :
< Il traverse l’agora comme une vipère ou un scorpion, l’aiguillon dressé, bondissant de-ci de-là, regardant à qui il infligera un malheur, une calomnie, un coup… Implacable, sans domicile, insociable, il ne connaît ni la reconnaissance, ni l’amitié, ni rien de ce que connaît un honnête homme… >
L’usage n’a conservé que la caractérisation psychologique et la réprobation morale qui s’attache au mot : fourbe, menteur, délateur, coquin.
Mais ce terme est désormais obsolète.
Car, à notre époque éclairée, le < sycophante > a disparu.
Nous avons des libéraux incorruptibles et de vigilants intellectuels citoyens.

Ascension et merveilleux chrétien…
 < Le réel est innommable parce qu’il est toujours singularité absolue > … Thèse centrale de la ‘pataphysique certes mais tout aussi bien et à sa manière… de la théologie.
< L’événement lui-même dépasse l’histoire des hommes, écrit le Père Jean-Robert Armogathe à propos de l’Ascension. Il est bien réel, mais il dépasse infiniment, de tout l’infini, les contraintes chronologiques >.
Pourtant, si tout événement est hapax, il n’en résulte pas que tout hapax soit miracle. Ainsi de l’ < élévation au ciel > du Christ devant les apôtres réunis sur le mont des Oliviers. Miracle, événement absolu et disparition définitive, qui ne signifierait pas abandon des hommes mais paradoxalement < présence réelle dans l’obscurité et le mystère, présence de l’alliance dans les sacrements du dieu caché mais vivant au milieu des hommes >.
La < plus grande présence > ou… le merveilleux chrétien.

Pétrone, la matrone d’Ephèse.
Courriel, de Solange.
Conte italien.
Du Satyricon : Une veuve accablée veille son époux défunt. A quelques pas d’ un gibet gardé par un centurion romain. Le soir venu les pleureuses abandonnent la jeune femme à son désespoir. Le militaire ému par tant de chagrin s’approche, la console et la séduit. Au petit matin, il découvre effaré que le corps du supplicié a été dérobé. Ce qui signifie pour lui une sanction infamante. La jeune veuve lui propose alors d’enlever le cadavre.
Avec ce mot : <mieux vaut pendre un mari mort que perdre un amant vivant. >

Hapax, frivolité, et ‘pataphysique.
De La Bruyère. Caractères, De la mode,31.
< Chaque heure, en soi comme à notre égard, est unique : est-elle écoulée une fois, elle a péri entièrement, les millions de siècles ne la ramèneront pas. Les jours, les mois, les années s’enfoncent et se perdent sans retour dans l’abîme des temps ; le temps même sera détruit : ce n’est qu’un point dans les espaces immenses de l’éternité, et il sera effacé. Il y a de légères et frivoles circonstances du temps qui ne sont point stables, qui passent, et que j’appelle des modes, la grandeur, la faveur, les richesses, la puissance, l’autorité, l’indépendance, le plaisir, les joies, la superfluité. Que deviendront ces modes quand le temps même aura disparu ? La vertu seule, si peu à la mode va au-delà des temps. >
La vertu ou… la ‘pataphysique ?…

Big mother ou… le nouveau paternalisme.
De Michel Schneider :
< Il est bon que le gouvernement aide aussi les gens à gérer leurs sentiments .> Tant de confusions apparaissent dans cette phrase de Ségolène Royal, qui se présentait comme « la ministre des mamans ». Il y a à la fois peut-être trop d’assurance et trop d’insécurité dans notre société. Trop absorbé par ses tâches maternelles et maternantes, l’Etat a de plus en plus de mal à remplir sa fonction paternelle : justice, armée, police, diplomatie. Il se mêle du bonheur privé, et n’assure plus la paix publique. Les sociétés de maternage sont, à l’image de ce qu’on appelle les familles monoparentales, les plus violentes. On y pratique un culte du bien dont on attend qu’il éradique les méchants. Big Mother promet le Bien et garantit à chacun son être. Quand se contentera-t-elle de contribuer au bien-être ? >
< Politique de proximité >, sollicitude envers les < vrais gens >, démagogie indiscrète et compassionnelle : dernier avatar paternaliste du fanatisme républicain et de l’ < esprit public >.

Pascal sur la < planète foot >
De Solange, cette réflexion :
< … Agitation planétaire. Quelques dizaines de jeunes gens en culotte courte vont, semble-t-il, se disputer… un ballon rond pendant quelques semaines au milieu d’un pré, sous les yeux avides de plusieurs centaines de millions de téléspectateurs… < Ainsi l’homme est si malheureux, écrit Pascal, qu’il s’ennuierait même sans aucune cause d’ennui, par l’état propre de sa complexion; et il est si vain, qu’étant plein de causes essentielles d’ennui, la moindre chose comme un billard ou une balle qu’il pousse, suffisent pour le divertir. > Pensée 139. Divertissement.
On notera la portée métahistorique de la remarque… Encore que l’auteur des Provinciales n’ait pu anticiper la mise en scène de la nouvelle idylle, de l ivresse sportive et spectaculaire cosmopolitiste ; ni l’idolâtrie de gladiateurs contemporains désormais assimilés à des oracles et auxquels est accordée la fonction tribunitienne.
Les vertus théologales de ce religieux opium ochlocratique ?
De l’aveu même des spécialistes : < le fric, la dope, la triche, la grossièreté >… les nouveaux facteurs d’ < intégration > proposés par certains politiciens post-modernes.
Très loin de cette turbulence, de cette grégarité et de ce mimétisme, j’ai songé, un peu nostalgique, à Homère, à Achille, à Patrocle et… au < pacte sacré des cuisses >…

Modestie… de la ‘pataphysique.
De Pervenche :
< … La ‘pataphysique n’est pas le miroir du monde mais une chose supplémentaire ajoutée au monde ; un événement… de surcroît. >

Diana Mosley ou une autre vision de l’ < Histoire >.
Courriel, de Bérénice :
… à la question de savoir si elle avait pressenti la carrière politique de Winston Churchill, Diana Mosley, épouse d’Oswald Mosley, chef de l’Union fasciste britannique, répond :
< Pas du tout. A la fin des années vingt il semblait fini. Il s’était mis à dos tous les partis politiques. Mais il espérait la guerre. Pour lui, la guerre c’était la vie. C’est ça qui était terrible chez lui. Plus tard il a trouvé en Hitler un ennemi idéal. A eux deux ils ont presque ruiné notre continent. >

Disparition de Niki de Saint Phalle.
Créatrice des < Nanas > et metteur en scène, au début des années soixante avec Jean Tinguely, des < Actions-tirs >, impasse Ronsin, à Paris.
On y tirait à la carabine ou au revolver sur un assemblage d’objets pris dans du plâtre, fixés sur un support pour faire éclater des sachets de couleur dissimulés sous ce plâtre afin qu’ils éclaboussent le tout de leur contenu…
Les frivoles extravagances de feu le < Nouveau Réalisme >…

< Grand et petit > : Botho Strauss et < la séparation >.
D’Odile, courriel :
Au théâtre. De Botho Strauss … une errance… Lotte, épouse délaissée en quête de compréhension et de stabilité dans un univers d’indifférence et de mépris. Elle traque un mari infidèle et brutal jusque dans la chambre de sa maîtresse… Chemisier blanc et jupe noire, une valise à la main, elle traverse la vie, naïve et désespérée… en une mosaïque d’intrigues successives et fragmentaires… rehaussée d’épisodes à l’humour décalé et grinçant…
Le loufoque côtoie le sordide… Il n’y a pas, il n’y aura jamais de < rencontre >.
Illustration de la thématique chère à l’auteur, la séparation, l’épreuve qui nous ramène à l’origine de toute peur.
L’événement fondateur de l’existence.

André Breton, Oscar Panizza et < l’Eternel Féminin >.
Postface au Concile d’Amour :
< … L’Eternel féminin garde chez Panizza toute sa valeur attirante, même s’il s’en faut que l’attraction s’opère comme pour Goethe en direction ascensionnelle. De Marie aux diverses créatures que tour à tour le Diable appelle à se lever du champ des morts, toutes -à la si émouvante exception d’ Héloïse- rivalisent d’inconscience et fleurent l’écueil. Pour ces dernières, c’est là le secret de la séduction persistante qu’elles exercent, à la mesure des ravages qu’elles font subir. Parmi elles, le Diable ne saurait se montrer trop difficile dans le choix de sa partenaire -celle dont la beauté doit s’allier à la perversité la plus gratuite- pour réaliser, dans les limites prescrites, ce chef d’oeuvre de perdition : la Femme, d’autant plus captivante que nocive jusque dans sa chair, comme absente d’elle-même et associant toutes les gloires du soir à son somptueux négligé. >

Une symphonie ‘pataphysique.
De Charmante, courriel.
En écoutant Berlioz, d’ après J.G. Prod’homme.1927. Traduction…
Argument :
… une jeune ‘pataphysicienne d’une sensibilité à vif et d’une imagination ardente s’empoisonne avec des Chimères, dans un accès de curiosité dämon-sirienne. La dose de visions, insuffisante pour l amener à la folie, la plonge néanmoins dans une espèce de léthargie onirique accompagnée des fantasmes les plus étranges.
Ses sensations, ses souvenirs, se traduisent en pensées et en images extravagantes. Les chimères deviennent textes, images obsédantes, partitions, et comme des idées fixes dont elle ne peut se distraire…

Bunuel, le hasard et < le fantôme de la liberté >.
A la vidéothèque…
< Nous allons célébrer le hasard >, avance le maniaque, un des personnages de la fiction cinématographique naguère écrite par Luis Bunuel et Jean Claude Carrière.
Le < hasard > : concept clef d’une poétique à dessein déconcertante.
Le film ?… une simple succession de plans-séquences rattachés les uns aux autres de la manière la plus ténue, -pour ainsi dire : tangentiellement -, dans la discontinuité d’épisodes liés par les procédés du coq-à-l’ âne et de l’ absurde poussé à la limite.
La paresse du spectateur attentif à la logique d’une intrigue est continuellement déjouée, mise en défaut, prise à contrepied, déstabilisée.
Aux antipodes de la romance et du didactisme édifiant.
D’où le malaise de l’esprit militant, de l’herméneute, du critique à clefs, d’où l’ incompréhension du spectateur naïf.

De la ‘pataphysique et de la nonchalance.

Rachilde, femme de lettres, < satan femelle >…
< Pornographe, soit ! Mais tellement distinguée ! >, Barbey d’Aurevilly.

De Pervenche, courriel à Charmante.
< … A sa manière la ‘pataphysicienne apporte le scandale.

  1. Elle ne révèle aucun royaume invisible.
    Point de Terre Promise dont on pourrait, à l’instar de Moïse ou du Christ, franchir le seuil.
    Point d’exaltation romantique ou surréaliste de l’Attente.
    La ‘pataphysicienne, n’est pas un Chevalier du Graal. L’existence lui est une épreuve sans quête.
    Et au fétichisme du Secret elle substitue la parodie des secrets.
    Incarnée dans la contingence, vivant l’aléa du quotidien, immergée dans la dérive générale des choses, elle participe de la précaire sécurité qui autorise un regard séparé et décalé.
    Un regard porté sur le monde. Monde insignifiant et indifférent.
    Mais aux arêtes vives.
    Un monde dépourvu d’interdits, sans mystère et inexhaustible.
    Tel est son lot, parmi les sorts jetés par la Moire.
  1. Le pacte méphistophélien fonde une trajectoire existentielle tout entière contenue dans le sursis.
    Toutefois l’existence n’est pas un théâtre où le lever de rideau découvrirait la possibilité et le rituel d’un Evénement.
    Rien ne s’accomplira jamais.
    Point de Damnation, point de Rédemption. Et il n’y a que des préludes.
  2. C’est pourquoi la ‘pataphysicienne ne s’intéresse ni à la psychologie ni à l’éthique. Alors que sa curiosité la mène vers les modes métaphysiques de l’irrationalité.
    Ainsi s’explique la nonchalance, la ‘pataphysique nonchalance, cet état de détachement lucide et désinvolte qui sépare les êtres désorbités de ceux qui gravitent, natures satellites, dans la paix des soucieux conformismes.
    Femmes délestées, dégagées de toutes les ornières, libérées de leur humaine fonction, éloignées du collectif et à la déambulation aussi improbable, qu’inutile et vide.
    Femmes très libres, affranchies de scrupules et de superstitions, en exil, flâneuses distantes, sans promesses et sans tabous.
Marie Laurencin, trois filles.
  1. Le nonchaloir…
    < Peu me chaut > donc, -voici la devise-, ou, dans le piège des mots, l’émergence d’un autre < jeu de langage >.
    Et l’ouverture d’une blessure… inguérissable.
    Telle est la règle qui prévaut dans le sempiternel loisir…
    Cruauté frivole du discret aparté ‘pataphysique. >

Au nom d’Ubu le Grand et Miséricordieux…
D’ Elisabeth Schemla, à propos de l’ouvrage d’Oriana Fallaci, La rage et l’orgueil.
< … Or Oriana Fallaci, au-delà de ses imprécations, commet l’impardonnable : …elle signe un livre de femme, d’athée et d’adoratrice des arts qui ne veut pas du totalitarisme religieux islamique…. Un livre de terroriste. C’est en femme qu’elle parle des hommes de ce monde musulman qu’elle a beaucoup sillonné, de déserts en révolutions. Des hommes islamistes, en particulier. Et sa violence, moins meurtrière on en conviendra, répond à la leur. C’est Abassi Madani qui a déclaré : « Les femmes sont une fabrique de musulmans » ; c’est le FIS qui a lancé une fatwa contre « l’impie » Khalida Messaoudi ; ce sont les intégristes du Bangladesh qui ont crié « A mort Taslima Nasreen ! » ; c’est Mohamed Attah, le chef des pirates de l’air d’Al Qaida, qui a écrit : « Pour mes funérailles, je ne veux pas d’êtres impurs, animaux et femmes… » ; c’est l’Arabie Saoudite tout entière qui leur est une prison, et même un cimetière lorsqu’elles commettent l’adultère ; ce sont Khomeyni et ses pasdarans qui ont cloîtré les femmes sous le tchador ; ce sont les talibans de Ben Laden qui les ont incarcérées sous la bourkah, et Massoud ne valait guère mieux… Ce sont tous ceux-là, et tant d’autres, qui les égorgent, les éventrent ou les décapitent par dizaines et dizaines de milliers. Et si les femmes qui en ont la liberté ne le dénoncent pas, ne le racontent pas et ne se révoltent pas, qui le fera ? Si peu d’hommes ont manifesté l’empathie dont Fallaci témoigne lorsqu’elle s’arrête, plume à la main, sur l’exécution en place publique, à Kaboul, de ces trois sacrifiées « coupables dont on ne sait quoi », traînées ensuite par les pieds comme des moutons… >
Au nom d’Ubu le Grand et Miséricordieux…

Les confidences d’un « homme de pouvoir ».
De Solange, courriel.
< Ceux qui ne connaissent rien à l’univers du pouvoir, écrit Erik Orsenna ( André Le Nôtre, portrait d’ un homme heureux ) … n’ imaginent pas non plus la force et la diversité des sentiments qui bouleversent les plus endurcis des monstres froids. On y aime et on y hait bien plus qu’on y calcule et manigance. Pour un mot du prince, un peu dur, pour un petit compliment, pour une froideur soudaine ou quelque infime marque d’estime, des coeurs battent la chamade, on pique des fards, on devient blanc, des suées viennent aux tempes et des moiteurs aux paumes… Les puissants en leur conseil ont l’âme tourmentée des jeunes filles au dortoir. >
Singuliers < hommes de pouvoir > ( sic ) aux émois de midinette…
Que dissimule cette présentation un peu précieuse, complaisante et attendrie, toute romanesque, bien qu’ informée, du pouvoir technocratique en… col claudine ?
Ce que d’ autres, témoins ou acteurs, tout aussi avertis mais quelque peu cyniques, décrivent, d’une plume frivole mais à l’encre noire, comme un monde plus prosaïque…
Ainsi : < De petits hommes gris, dépendants, compétents et serviles, passés au moule des Ecoles, flagorneurs abbés de cour opportunistes, introduits et intrigants, obséquieux courtisans, mi-caniches mi-hommes de main, au service de passions politiques exacerbées et d’ intérêts économiques très réels, -que Renart, le monarque républicain, flatterait du sourire, de la voix et de la main, qu’ Il récompenserait par les emplois, les dignités et les prébendes -, mais tourmentés par la hantise obsessionnelle du soudain, terrifiant autant qu’ imprévisible congé… > Bérenger Second.
Car quoi de plus cruel, de plus navrant, que de quitter < le monde > pour s’en … < retourner à son néant >, – ainsi que le note d’ une manière si suggestive le Mémorialiste…
A suivre cette veine, -les < sociétés de cour > reproduisant à l’identique des conduites de sérail ou… de milieu-, il serait judicieux, pour les bien cerner, de reprendre les analyses quasi ethnographiques si perspicaces des contemporains du Grand Siècle : La Fontaine, La Bruyère, Fénelon, Saint-Simon…
Eadem mutata resurgo donc…
En vérité, ce sont là de bien malheureuses < jeunes filles > …

De l’autorité ou sur un mot de Hanna Arendt.
En lisant, en tricotant…
< L’autorité, c’est l’exercice du pouvoir sans l’usage de la force >, soutient Hanna Arendt.
Thèse discutable.
-Auctoritas, de auctor, signifie : qui augmente ; puis, qui augmente la confiance, donc garant, modèle, autorité.
Jaspers remarquait que le mot et la notion nous viennent de la pensée romaine. Auctor, c’est celui qui soutient une chose et la développe ; auctoritas c’est la force qui sert à soutenir et à accroître .
La pensée romaine fonde donc l’autorité sur la force. Et, prolongeant l’idée, < pas d’autorité, pas de droit, pas de justice sans l’appoint de la force >, affirmera Pascal.
-Pouvoir, c’est d’autre part capacité, compétence et compétence reconnue. D’où le prestige et la réputation, qui confirment l’autorité ; d’où, éventuellement, le charisme.
-Enfin, < l’autorité sans la force > selon H. Arendt, s’interdit-elle la rétorsion, le harcèlement, la ruse, le chantage, la machination ?

Marivaux, du hasard et de la méthode.
En lisant.
Le spectateur français, première feuille.
< … Oui ! je préférerais toutes les idées fortuites que le hasard nous donne à celle que la recherche la plus ingénieuse pourrait nous fournir dans le travail… … Je ne destine aucun caractère à mes idées ; c’est le hasard qui leur donne le ton ; de là vient qu’une bagatelle me jette quelquefois dans le sérieux, pendant que l’objet le plus grave me fait rire… … je n’ai jamais pris la peine de soutenir une conversation, ni de défendre mes opinions, et cela par une paresse insurmontable… >

Du hasard, de la guerre, de la mort.
En lisant, en tricotant.
De René Quinton, Maximes sur la guerre, 1930.
< 1. Les justes aiment la guerre parce que le hasard y préside aux peines et non le fantôme de la justice.

  1. La guerre est le mode noble de l’activité humaine… Aucun contact n’y est vil. Les hommes y sont frères. Qui n’a pas fait la guerre ne connaît pas l’homme.
  2. La guerre autorise tout. Le soldat est un pauvre, mais à qui le monde appartient.
  3. On est heureux à la guerre du seul fait de vivre. L’existence y est une sorte de cadeau permanent.
  4. La guerre est un jeu terrible où l’on gagne toujours sauf une fois.
  5. Les historiens assignent aux guerres des causes raisonnables, d’ordre politique ou économiques. C’est prêter à l’homme beaucoup de logique et limiter l’amour aux mariages de raison.>
    Sur le même sujet ce mot de Montaigne :
    < … qu’ il n’est occupation plaisante comme la militaire. >
    Et cette remarque de René de Lacharrière, Le fascisme et la complicité de la mort :
    < L ‘armée a pour métier de donner la mort, ce qui lui confère déjà du sérieux, mais pour vocation de l’affronter, ce qui lui ajoute du charme. Elle recrute depuis toujours en exploitant l’attrait de cette approche. Elle sait d’une très vieille science qu’elle peut payer en cette monnaie les tueries où elle mène en temps de guerre, les sujétions qu’ elle impose et jusqu’à ses ridicules du temps de paix. Même éventuels et lointains, le combat et le danger la soutiennent. Par eux, elle détient l’émotion qui fait pâlir toutes les autres, la chose grave par excellence qui repousse dans l’insignifiance les préoccupations ordinaires de la vie, la mise en scène des épreuves qui classent les hommes dans une hiérarchie supérieure à toutes les conditions sociales. >
    Quant au goût des femmes pour la guerre, ce mot de Martin Van Creveld, Professeur à l’université de Jérusalem : < La vraie raison des guerres est que les hommes aiment combattre et que les femmes aiment les combattants. > Les femmes et la guerre, Rocher, 2002.
    Qu’en pensent nos pacifistes ?

Flagornerie…
Ce passage tiré du Bréviaire des politiciens, attribué à Mazarin :
< … Si tu veux établir ta glorieuse renommée… mets-toi aussi en rapport avec des écrivains spécialistes du genre, pour que dans leurs ouvrages ils glissent un éloge de ton caractère et de tes accomplissements. De la sorte ils feront plus pour ta réputation qu’un gros livre que personne n’a envie de lire ou d’acheter. >
Tel est le bon usage de la < machine à gloire > selon Villiers de l’Isle Adam.
Il en est toutefois des compliments comme de certains de nos  » amis « : leur musique est indiscrète, elle froisse notre pudeur ; elle est décidément bien embarrassante.
Au trombone -voire au tuba-, il est possible de préférer le cor anglais…
C’est une affaire de goût.

Dieu peut-il être trompeur ?
Courriel, de Pervenche.
En écoutant les Etudes, paraphrases et autres < traductions > de Scriabine…
< Dieu ne peut être trompeur, affirme Descartes en sa Troisième Méditation, puisque la lumière naturelle nous enseigne que la tromperie dépend nécessairement de quelque défaut. >
Bien qu’il semble au regard de la ‘pataphysicienne que pouvoir tromper soit plutôt une marque de subtilité et de puissance, vouloir tromper n’exprimerait pourtant selon le philosophe que la faiblesse ou la malice…
C’est que le dieu de Descartes, < Souverainement Être >, est aussi < Souverain Bien > et < Souveraine Vérité >. Car < il est évident qu’il n’ y a pas moins de répugnance que la fausseté ou l’ imperfection procède de Dieu en tant que telle, qu il y en a que la vérité ou la perfection procède du néant. > ( Réponses aux Deuxièmes Objections )
Exit le < Malin Génie >. Le Dieu romain ne saurait être malicieux…
Tel n’était pas l’avis des Grecs, pas plus d’ailleurs que celui des anciens Germains…
Un Dieu vérace, seulement vérace, leur était inconcevable. C’eût été comme un dieu pris en défaut… Et la simulation, la dissimulation, loin d’apparaître comme des attributs négatifs de la substance divine exprimaient tout au contraire les vertus essentielles des Olympiens.
Deux images de la divinité et surtout deux types de piété s’opposent ici, irréductiblement…
-Manifestation de la psychologie et de l’anthropomorphisme chrétiens, tel est le syllogisme de la pitié : Dieu ne peut nous tromper car la tromperie est un mal, elle est douleur et souffrance. Or Dieu est miséricorde. Il veut donc < nous > soulager.
Le fantasme de la béatitude suppose la véracité et s’accompagne d’une inquiétude de sotériologie.
-Un Grec décelait tout au contraire dans la malice et la ruse, la Métis, la marque de l’excellence par le divertissement et la sempiternelle jeunesse…
( Sur ce point, voir les analyses de J. P. Vernant )
Quand bien même elle se serait exercée à nos dépens.

Un mot de Dorimène.
Courriel, de Charmante.
De Molière, Le Mariage forcé, scène 2, cette agréable réplique à Sganarelle :
< j’aime le jeu, les visites, les assemblées, les cadeaux et les promenades, en un mot toutes les choses du plaisir >

Expliquer l’inexplicable par… l’inexpliqué.
Réflexion…
C’est la méthode habituelle de quiconque ne se satisfait pas de devoir donner… < sa langue au chat >…
Ainsi d’un acte criminel apparemment dépourvu de motifs rationnels : les tentatives positivistes psychosociologiques déçues, reste la possibilité d’invoquer la < pulsion >, espèce de chimère conceptuelle convoquée ad hoc, pour le besoin de la cause.
La soif d’intelligibilité est satisfaite ; l’inquiétude psychologique qui l’accompagne est apaisée.
Vanité d’une prétendue réponse qui n’est jamais que l’art de baptiser et/ou de masquer une difficulté.

DE L’UTOPIE

A Charmante, courriel, note de lecture ( R. Ruyer, L’utopie et les utopies ).

  1. définition : l’utopie comme genre littéraire.
    Origine du mot :
    Thomas More, 1518, Utopia sive de optimo republicae statu.
    Description d’une île imaginaire dont le gouvernement a été fondé par le roi Utope. U-topie signifie < Nulle part >.
    L ‘auteur cherche à s’ assurer une crédibilité, différente de celle du romancier, la croyance au < possible > décrit.
    Essence :
    Description d’un monde imaginaire en dehors de l’espace-temps conventionnel, historique et géographique.
    Monde constitué sur des principes différents de ceux qui ont cours dans le monde réel :
    -distinct du roman où les aventures et les personnages imaginaires même féériques sont placés dans le monde ordinaire.
    -distinct du roman scientifique qui ne joue que sur un possible bien défini, le possible technique dont les effets demeurent dans les cadres de ce même monde. ( De la terre à la lune, de Jules Verne ).
    -distinct du conte fantastique ou surnaturel. Il y est moins question d’un autre monde que d’une autre nature. Intervient ici une autre vision de la nature, archaïque et prélogique.
    Il est onirique. Il est dépourvu de valeur spéculative ou sociale.
    Le dessein de l’utopie est positif, elle est scientifique et technique. C’est un jeu mais un jeu sérieux. Elle ne s’éloigne pas de la notion habituelle de nature. Elle change de monde.
    Elle n’a pas le caractère enfantin du conte de fée. Ni le caractère morbide, noir, du conte fantastique qui, sans changer de monde, joue avec la transgression du surnaturel dans le naturel.

1.1. l’utopie et le mythe.
Le mythe est projection sur le monde de complexes humains. Il décrit les permanences anthropologiques, l’homme éternel ( Mircéa Eliade ), le monde éternel et leurs rapports.
L’utopie est d’essence théorétique ; elle se veut objective. C’est un jeu sur l’objet ; elle en étudie les possibles objectifs. Le soupir, l’aspiration, la nostalgie et le rêve y sont secondaires.
L’utopie n’explique pas – aspect théorétique du mythe-, spéculative et praticienne, elle invente.
Les mythologies préparent les premières métaphysiques. < Le mythe est un philosophème> ( Schelling ). Il satisfait une curiosité métaphysique et religieuse ( Création, Mal, souffrance, pudeur…). Le mythe s’ intéresse à l ‘origine des techniques et des arts -< In illo tempore >-, l’ utopie aux possibilités des arts et des techniques.
Le mythe est l’inverse de l’utopie qui parvient à l’éternel par l’histoire. Mais elle peut rejoindre le mythe. ( Renan, Shaw, Stapledon ) dont elle reprend les aspirations ( immortalité, toute-puissance, création d’ êtres vivants, divinisation de l’humanité.
1.2. les desseins de l’utopie.
On distinguera :
-les utopies d’ évasion ( L. Mumford ). Distinctes des utopies de reconstruction. < cités du bonheur >, idylles rêvées. Manifestant un désir d’ordre et de paix. Oasis. Arcadies ( Nouvelles de Nulle part, de Morris ).
-les utopies critiques ( Platon, Morus, Fénelon, Morris, Welles ). Critique exercée d’une manière indirecte par la présentation d’un anti-monde, monde parallèle ou déformé.
-les utopies d’exploration, neutres. Projets de législation ou de constitution.
-les utopies de divertisement pur. Affabulation pour l’affabulation, Âge d’or, voyages de fantaisie, anticipations.

  1. l’utopie comme expérience mentale.
    C’est le point le plus important.
    -Thèse : L’utopie est un procédé, le mode utopique est d ‘être un exercice mentale sur les possibles latéraux. Elle ne cherche pas la connaissance de ce qui est ; elle est pouvoir d’ exercice concret.
    Inversement comprendre est une conduite mentale où intervient plus ou moins le mode utopique. Communauté de nature de l’utopie et de l’hypothèse.
    L’utopie comme cas particulier d’une méthode générale employée en mathématiques -mythes de Poincaré : planète couverte de nuages perpétuels ; le monde non soumis à la loi d’inertie ou aux orbites sans excentricité ni inclinaison ; l’univers dont les dimensions deviennent mille fois plus grandes en une nuit ; le monde des animaux infiniment plats, -en philosophie ( Statue de condillac, Atlantide de Platon dans le Critias )…
    Le rejet d’un postulat, le changement de l’axiomatique, équivaut à un changement de monde, en géométrie comme en sociologie.
    Le procédé utopique est très proche des procédés ordinaires d’invention scientifique : méthode hypothético-déductive et expérience mentale.

-Le Roy ( Logique de l’ invention ) recommande au savant de < s’amuser aux fictions qui font voir les choses sous un jour inattendu >.
-E. Mach ( La connaissance et l’ erreur ) : < Ceux qui font des projets, ceux qui bâtissent des châteaux en Espagne, romanciers et poêtes, qui se laissent aller à des utopies sociales ou techniques, font de l’expérimentation mentale ; d’ailleurs le marchand sérieux,l’inventeur réfléchi et le savant en font aussi… >
Il propose comme exemple de jeu intellectuel donnant naissance à des découvertes le problème extrait du Thaumaturgus mathematicus ( Cologne,1651 ) : on a bâti tout autour de la terre un pont absolument régulier, puis on en retire simultanément tous les piliers. Qu’arrive-t-il alors ?
Les utopistes entre les rêveurs sans consistance, les romanciers et les poètes et les scientifiques. Le procédé utopique ne s’ interdit pas une certaine tricherie en faveur du pittoresque, du désir, de la caricature. L’utopiste social n’est pas un sociologue. ( Wells, l’ Utopie moderne ).
Le procédé utopique au contraire de la démarche scientifique peut continuer à travailler sur une expérience fausse.
-Le mode utopique et l’invention.
L’exercice utopique comme l’invention implique une rupture des combinaisons habituelles. L’utopie est le commencement de la science. Une foule d’inventions ont dû commencer par un jeu utopique que le joueur ne prenait pas au sérieux ( Le Roy, Revue de métaphysique, 1905 ).
Et le procédé utopique est auxiliaire de la théorie. Comprendre la gravitation ( Newton) c’est faire l’utopie d’une terre où il n’y aurait pas d’attraction. Cf dans le même sens : la < cage suspendue dans le vide > d’Einstein ; la< planète creuse > de Newton ; Last et first men ( Stapledon ).
Il est critique d’un préjugé, d’un postulat. Il met en évidence l’ étrangeté égale du postulat admis. Les scandales scientifiques élargissent l’ esprit.
Cournot : < Si l’ homme était en commerce avec des êtres raisonnables d’ une autre nature que la sienne; si nous connaissions plusieurs espèces d’animaux raisonnables comme nous connaissons une foule d’espèces qui se rapprochent beaucoup de la nôtre par l’ensemble des organes et des fonctions de l’animalité, nul doute que nous n’ eussions bien d’autres moyens de compléter la critique de nos connaissances… mais de pareils termes de comparaison nous font défaut >. Essai sur les fondements de la connaissance…
Les utopistes prétendent y suppléer par l’ expérience mentale.
L’utopie indique le champ des possibles. Et les possibles latéraux donnent à la fois un terrain pour l’invention et un champ pour la critique. Elle montre l’abus de l’usage et son caractère arbitraire ou conventionnel.
Elle est critique de la sottise.

  1. caractères généraux de l’utopie sociale.
    Le thème et la manie / chimère de la < Cité de cristal > ( Dostoievski ).
    Symétrie-Uniformité-Transparence-Unanimisme-Hygiènisme-Rationalisme-Croyance en l’Education-Hostilité à la nature-Dirigisme-Institutionalisme-Collectivisme-Autarcie et isolement-Ascétisme-Eudémonisme collectif-Humanisme-Prosélytisme-Prétention prophétique.
  2. utopie, pastiche, fiction. Signification pataphysique de l’utopie.
    Le pastiche comme l’ utopie est exercice sur les possibles latéraux. Il étend le champ de l’expérience mentale dans les domaines de l’art, de la littérature, de l’histoire.
    Le pastiche est peut-être le meilleur moyen de faire de la critique littéraire. Pasticher une oeuvre, une époque, c’est montrer qu’on en a bien saisi l’esprit ou l’essence.
    Pastiche, utopie, parodie sont expressions caractéristiques de l’intelligence, aptitude à saisir des thèmes signifiants.
    Conclusion :
    Un esprit libre est un esprit apte à imaginer autre chose que ce qui est.
    Mettre en relation Utopie et ‘pataphysique, la « science » des solutions imaginées et imaginaires…
    ‘Pataphysique = fictionnaire.

Stephen Jay Gould.
De Pervenche à Charmante.
Note. ( La recherche, Nature, etc. )
Disparition du célèbre paléontologue américain.
On lui doit d’avoir affirmé le rôle crucial du hasard dans l’émergence de l’homo sapiens.
Ses premières recherches aboutissent à une remise en cause du gradualisme évolutionniste darwinien et de son concept d’évolution et de sélection naturelle des espèces par voie d’adaptation lente.
Dès 1972 il échafaude avec son collègue Niles Eldredge une critique radicale de l’adaptionnisme en pointant les contradictions du darwinisme et les < trous > dans les lignages fossiles que des changements lents par accrétions ne sauraient expliquer.
Selon Gould l’évolution fonctionne par a-coups : des épisodes de crise, suivis par des spéciations rapides et parfois brutales, en réponse notamment à des changements climatiques, succèdent à des périodes relativement stables.
D’où le nom d ‘< équilibres ponctués > qu’il donnera à sa théorie.
L’homme est le fruit du hasard.
< Les humains ne sont pas le résultat final d’un progrès évolutionnaire prédictible mais plutôt une arrière-pensée cosmique fortuite, une minuscule petite brindille dans l’énorme buisson arborescent de la vie >.
Si la vie sur Terre devait repartir de zéro, même un million de fois, elle ne produirait en toute probabilité aucun mammifère et encore moins une créature ressemblant à l’ homo sapiens.
Ce professeur de Harvard eut à témoigner devant les tribunaux américains contre les fondamentalistes protestants créationnistes qui exigent l’enseignement ( sic ) à l’école de la version biblique de la création.
A lire, La structure de la théorie de l’évolution.

Le magistrat, la loi et le foetus…
Scandale chez le bien-pensant… La parole performative des juges refuse au foetus le satut de… < personne > ( sic ).
Remarquons d’une manière liminaire que celui-ci n’avait, semble-t-il, rien demandé…
-Voici donc un état -unique- où le vivant humain échappe à la qualification pénale.
Il n’existe en effet aucune incrimination pour l’atteinte au foetus ; le juge pénal ne peut pas lui-même créer une incrimination si cela n’a pas été fait par le législateur… qui ne semble par ailleurs guère pressé de légiférer.
Ce qui vulgairement signifie : se repasser… le bébé.
En l’état actuel du droit, le foetus est bien < un être vivant > mais il n’acquiert le statut de < personne > qu’à la naissance.
Il est donc pour le moment libéré de la Loi et des lois.
Le bienheureux !… A l’instar de la ‘pataphysicienne…
-Il se trouve toutefois de bonnes âmes pour déplorer les arrêts successifs de notre Cour de cassation. Décisions – < speech acts > ( Austin ) – qui suscitent effectivement de houleux débats et des réactions passionnées.
< A partir de quand l’être humain est-il respectable ? >, telle est donc l’ embarrassante question…
A la conception ? à la date autorisant l’interruption de grossesse ? à la naissance ?
Cette question ressemble à s’ y méprendre à un ‘patakoan…
Pour l’heure nous disposons de trois réponses et autant… d’incertitudes.
En attendant les prochaines…

Mammographie de Mère Ubu…
De Bérénice, cette relation…
Agence pataphysique de presse.
< LISBONNE (APP) – La police portugaise enquête pour savoir qui a convaincu quatre femmes de se dénuder jusqu’à la taille devant leur fenêtre ou leur balcon pour effectuer une prétendue mammographie par satellite. Ces quatre femmes, âgées de 19 à 45 ans et demeurant en Algarve ( sud ), ont porté plainte il y a une semaine, rapporte le quotidien Publico. Elles affirment avoir été contactées par téléphone par une femme médecin leur assurant une technique révolutionnaire pour examiner leurs seins: une mammographie par satellite. Il leur suffisait de se placer nues jusqu’à la taille bien en évidence devant une fenêtre ou sur un balcon en direction d’un « satellite » situé sur les hauteurs de la localité de Messines. La consultation était gratuite à condition qu’elles respectent scrupuleusement les instructions. L’une d’elles a même poussé le zèle jusqu’à se dévêtir complètement. Le résultat de l’examen, communiqué par téléphone, a été des plus surprenants, la « médecin » décrivant avec force détails son vif plaisir sexuel. Les quatre femmes se plaignent à présent d’atteinte à leur intimité. >

De l’insolence, de l’insolite et de la ‘pataphysique.
De Charmante, réflexion.
< Satan tomba du ciel ainsi qu’un éclair ; et, assemblant avec lui tous les compagnons de son insolente entreprise… > Bossuet, Premier sermon, Démons, 2.

  1. Sont dits < insolents > les propos et les conduites qui témoignent d’un manque de respect ou de déférence à l’égard des usages, des pouvoirs et du Pouvoir.
    Et qui par là même manifestent à leurs yeux un < orgueil offensant > qu’ il convient de confondre et de réprimer.
    Ainsi < tout homme insolent est en abomination au Seigneur >, peut-on lire dans la suite des Proverbes attribués au fils de David, le roi Salomon ( 16,5 ).
    L’ < autorité > quelle qu’ elle soit, politique, religieuse, juridique, universitaire, médiatique ou plus généralement cléricale, ne saurait tolérer l’offense qui la mine et un certain ton de contestation qui l’ outrage.
    Il en va de sa légitimité et donc de son existence.
  2. A quitter le terrain des obligations sociales pour gagner le plan métaphysique, on ne manquera pas de rencontrer le sens premier du terme insolence -d’après le latin et l’usage du 16° siècle :
    insolentia, de insolens, qui a proprement le sens d’action ou de chose… insolite.
    Est dit < insolent >, ce qui est inaccoutumé. ( De solere, avoir coutume ).
    Le fond du concept est bien l’idée de discontinuité, de rupture, d’ inattendu mais jugé ou qualifié d’ inapproprié, d’ inopportun par la puissance qui s’ en estime offensée.
    Cependant, à suivre cette ligne, il faudrait se demander si ce n’est pas le réel qui dans la généralité de son être -c’est-à-dire dans la succession des exceptions dont il est constitué ( thèse ‘pataphysique fondamentale )-, ne pourrait pas être caractérisé comme l’insolence même…
    Rapprochement… aussi insolite que redoutable.
    Car selon les deux occurrences, politique ou ontologique, la menace perce. Puisqu’au pouvoir contesté répondrait dans le cours des choses l’ absence de nécessité.
    Monde de la contingence pure ou encore de l’incongruité indéfiniment répétée.

Ainsi le réel serait-il déclaré insolent parce qu’insolite il ne cesserait de décevoir ou de surprendre notre attente.
Ce qui semble bien être le cas…

  1. Et la ‘pataphysique, < irrespectueuse > par essence, < image du réel autant qu’image des images du réel c’est-à-dire de toutes les expressions de l’ insolite > ( Dämon Sir, De l’incertitude ), prendrait enfin et en toute conscience < le parti pris des choses > et donc… le masque de l’ insolence.
    Mais au deuxième degré.
    *
    L’ insolente ou… la ‘pataphysicienne -qui, à l’instar de l’Ange au sourire de Reims, ne rit pas mais qui sourit-, serait-elle l’ unique véridique ?
    Quelle arrogance…

< Ses discours insolents m’ont mis l’esprit en feu Et je veux prendre l’air pour me rasseoir un peu. >
Molière, Tartuffe, 2, 2.

Tourisme pataphysique. Picasso… picassiette. La France insolite et le religionnaire.
De Solange, courriel. De Franck Chauvet, La France insolite ( Eure-et-Loir).
< C’est à partir de 1928 Que Raymond Isidore commencera son oeuvre. Durant trente ans il va infatigablement chercher et ramasser les débris de verre et de porcelaine, les éclats colorés dont il décore les murs de sa maison, dans la rue du repos. Une activité qui lui vaut son surnom de Picassiette. Il devient architecte et sculpteur par la grâce, dit-il, d’une force supérieure qui le pousse à se bâtir un palais multicolore de prince oriental. Il s’inspire pour cela d’illustrations trouvées dans les livres pieux et les journaux, sur les calendriers et les cartes postales, dont il mélange et combine les motifs. Pour ériger son monument baroque il va manipuler et employer quinze tonnes de débris de porcelaine. La façade, les murs intérieurs, les sols, les plafonds sont entièrement recouverts de mosaïques. La visite commence par les paysages de France, où il n’hésite pas à camper une caravane en route vers une cité mystérieuse. Dehors, appuyé contre la façade arrière de la maison, la chapelle de style peu orthodoxe abrite un Christ noir. < C’est une réalisation née de ma croyance personnelle >, affirmait Picassiette.
Et de fait, tout est étrange et sans équivalent dans cet univers.
Plus loin, passé un porche, on débouche dans la Cour noire, où trône le tombeau, gros bloc de pierres de mosaïque noire, supportant une réduction de la cathédrale de Chartres, ornée de symboles, telle une madone vêtue de bleu, une rosace en soleil. Dans le jardin, des sculptures -La Fayette, la Mère nature. Sur le mur intérieur, des fresques représentant des paysages de France sont ponctuées d’étranges masques en ciment.
La dernière partie de ce jardin est un parterre géométrique dominé par le trône de l’Esprit du ciel surmonté d’une monumentale mosaïque de la ville de Jérusalem. Derriere le trône, la tombe de l’Esprit, espace sacré nimbé de lumière céleste, planté d’un pilier central qui porte l’inscription : Dieu Jésus Marie Joseph ici l’étable de Bethléem ici repose l’esprit.
< Mon jardin c’est le rêve réalisé, le rêve de la vie où l’on vit en esprit dans l’éternité >, dira-t-il de son oeuvre.

D’une proposition insolite : prostitution libre et gratuite.
D’Odile, courriel.
Contri-ubu-tion au débat public : < faut-il rouvrir les maisons closes ? >.
Cette intéressante proposition citoyenne recueillie dans une gazette ( Matthieu Lindon, 13. 07. 2002 ) :
< Le plus juste serait de remplacer le défunt Service national en une année de prostitution libre et gratuite pour tous les garçons et filles d’une classe d’âge : la population serait soucieuse de leur santé ( puisque ce serait nos enfants ), et pour eux ça ferait une sacré initiation à la vie sociale, à la vie sexuelle et à la République.>
Et d ajouter : < Il faudrait demander aux femmes marièes si elles ne sont pas favorables à la prostitution de autres. >…
Avec très probablement l’arrière-pensée d’ une incidence notable sur le nombre des divorces…
Retour donc au tendre Donatien…
De quoi scandaliser les représentant(e)s des valeurs du néoconformisme social-libéral puritain ( travail-famille-droits de l’homme ).

Les mots…
De Charmante, courriel.
Ce rapprochement suggestif : < Historique, hystérique >.
Ces deux < mots-valise > :
-fatlus : vanité masculine.
-fellahtion : sur les rives du Nil. Les larmes d’Isis ou le plaisir d’Osiris ?
-évangil : bonimenteur, farceur, mauvais plaisant.

‘Pataphysique de la < terreur> ( esquisse ).
De Bérénice, Notes.
La < terreur >. Thème… médiologique.
Définition.

  1. Concept psychologique.
    Etat de conscience. Être < terrorisé(e) >.
    Passivité du sujet qui subit une violence à but dissuasif, visant à paralyser l’initiative, à intimider.
  2. Concept politique.
    Terrorisme : conduite de désobéissance, activité d’un individu ou d’un groupe se posant en victime et qui d’une manière réactive conteste par l’extrême violence un ordre social, un état de soumission idéologique, un rapport de force hiérarchique -en dehors des normes et des règles communément posées et admises par le droit positif et la morale de ceux dont il refuse la domination.
    Modalité.
    Utilisation particulière de la violence. A mettre en relation avec la violence de < Partisan > ( Carl Schmitt ).
    Dernier recours des < faibles >.
    Remarque.
    Toute violence n’est pas terroriste ou jugée telle.
    Saint Augustin, saint Ambroise et saint Thomas ( Somme de théologie Question 66, Le vol et la rapine ) justifient le vol < de détresse > et la < légitime défense >.
    L’Eglise romaine refuse par contre le terrorisme.
    Mais la violence -l’usage illégal de la force- peut se vouloir < terroriste > à la manière d’une stratégie ultime… ou être déclarée telle -< speech act >- par celui ou celle qui en subit les conséquences.
    Ii s’agit ici d’ une stricte affaire d’ interprétation.
  1. Moment particulier de l’histoire de France, < La Terreur >.
    Etat d’ exception.
    Mise entre parenthèses du fonctionnement habituel des institutions prétendument justifiée par une situation géopolitique < exceptionnelle > et des fins < rationnelles > ( cf Robespierre et le Comité de Salut Public : repousser les Impériaux, éradiquer les forces contre-révolutionnaires et « fonder sur la terre l’empire de la sagese, de la justice et de la vertu », Discours du 7 juin 1794 ).
    A comparer à l’usage de la < Prérogative >, cette modalité plus euphémisée du Pouvoir qui affirme agir certes « légitimement » mais cependant < dans le silence de la loi > ( cf Locke, Deuxième Traité…) -pour mieux répondre dans l’urgence au caractère < particulier > d’une situation.
    Cause, origine.
    Protestation extérieure à un ordre légal donné et qui se fonde généralement sur le < droit naturel >, ou à tout le moins sur un supposé < bon droit >.
    Portée et Fécondité.
    But : confondre, brouiller le discernement de l’adversaire.
    Comment ? Par l’ < action psychologique >.
    Emouvoir, c’est faire douter. C’est aussi susciter la culpabilité, la honte et le remords.
    Jouer sur les ondes de la rumeur ; intensifier la mise en scène et le spectacle de < l’horreur >. Surtout à l’ère des civilisations de masses aux émotions façonnées et dominées par les médias ( psychologie des foules à l’échelle planétaire ).
    De ce point de vue le terrorisme est mise en scène, spectacle… au sens strict : feu d’artifice.

Y aurait-il une < esthétique du terrorisme > ? question impie…
Le terrorisme est un combat, une variation sur le thème de la guerre continuée -la lutte de tous contre tous ( Hobbes )-, mais… < par d’autres moyens> ( Clausewitz ).
Valeur.
Activité :

  1. justifiée :
    -du strict point de vue politique par ceux qui l’exercent : la fin, incontestable, noble, préconisant le meurtre, l’assassinat collectif, les sacrifices et le martyre, autorise l’ensemble des moyens employés ( cf les analyses d’Albert Camus, L’homme révolté, et la mise en scène des Justes ).
  2. condamnée :
    -politiquement par l’Imperium, l’Autorité en place, le Pouvoir hégémonique, les représentants de l’ordre établi -quel qu’il soit.
    -éthiquement par les religions et autres systèmes de représentation / idéologies universalistes.
  3. Réfléchie et… tenue à distance par la spectatrice ‘pataphysicienne, en dehors de toute espèce de jugement de valeur, comme une modalité parmi d’autres de la < météorologie anthropologique >.

De la fesse et de l’herméneutique…
Courriel, de Charmante.
Agence pataphysique de presse.
< Ulf Buck, un Allemand aveugle et extralucide, a sa manière à lui de lire l’avenir. Avec ce qui lui permet de lire, c’est-à-dire avec ses mains, il prédit l’avenir sur les fesses de ses clients qu’il préfère clientes. Dans son cabinet de consultation du village de Meldorf près de Hambourg, il explique à qui veut l’entendre que l’arrière-train des gens, comme les paumes de la main, peut être lu et révèle le caractère ainsi que la destinée des gens. >
Ce qui s’appelle lire à… Bible ouverte…
Que voilà un aimable herméneute…

De la récurrence.
Note.
Comment expliquer l’usage récent et véritablement inflationniste du terme de < récurrence > ?
Par le désir intempérant d'< intelligibilité >.
Récurrence ( latin recurrens, de recurrere, courir en arrière; revenir en courant ) signifie proprement le caractère de ce qui se répète, de ce qui se reproduit périodiquement, de ce qui revient sur soi.
Or, si cette propriété vaut pour les mathématiques, son usage est plus que problématique pour l’intelligence des divers plans du réel.
-Le raisonnement par récurrence est un procédé de généralisation qui s’applique à l’arithmétique et aux mathématiques, et qui étend à tous les termes d’une série homogène toute propriété possédée par les deux premiers.
Cette < homogénéité > est supposée dans les sciences expérimentales comme condition nécessaire pour que le passage des faits particuliers aux lois ( induction ) soit valide.
Ce qui traduit un véritable < coup de force > de la métaphysique rationaliste qui n’hésite pas, par exemple, à l’ étendre à la prétendue lecture des événements historiques…
-Or < il n’y a ni répétition ni série ni récurrence dans le monde des phénomènes.> ( Dämon Sir, De l’incertitude ).
Chaque événement est unique, hapax. Rien, absolument rien n’y est homogène.
Chaque être -ligne d’univers-, est qualitativement < distinct >.
La quantité, le nombre et la mesure ne sont que des catégories, des outils de la pensée appliquée à un réel en soi < incommensurable >…
( A ce propos cf Aristote, Catégories et surtout, pour les faits de conscience, Bergson, Données immédiates, Chapitre 2. )
L’ exception, la distinction -le < dandysme >- sont… la règle.
En conséquence de quoi et au sens strict :

  1. toute connaissance d’un réel définitivement impensable est… artifice.
  2. et l’ application -naïve- du procédé de récurrence n’est que la marque d’une confusion de la logique et de l’existence.

De la conscience morale comme maladie de l’âme. ( Ubu50. Figures )
 Note de lecture. Nietzsche, Généalogie de la morale, 2.

  1. Thèse.
    Il n’existe pas de sujet moral < autonome >, fondateur de la décision morale. Le daïmon socratique est une fable, l’ autonomie kantienne, une naïveté et une superstition.
    La conscience morale n’est qu’un symptôme de dégénérescence de la plante humaine. Elle n’est nullement consubstantielle à l’humanité. C’est un produit historique.
    Seule la < moralité des moeurs > est une nécessité sociale. Elle est obtenue par < dressage >. Il s’agit d’une domestication de l’homme par l’homme. La < souffrance et la cruauté > en sont les leviers.
    La conscience morale est un effet de la modernité. Elle est intériorisation du sentiment de culpabilité. Elle est < mauvaise conscience>.
  2. Méthode.
    Nietzsche juge de la morale en généalogiste et en historien.
    Il pose la question de la valeur des valeurs, notamment celle des valeurs morales. Quelle est l’origine -et non le fondement- de nos conceptions du bien et du mal.
  3. Genèse de la conscience morale.
    Nietzsche distingue deux moments.
    -Dans un premier temps, on dressa l’animal-homme en être capable de < promettre >, de tenir sa parole.
    -Dans un second temps, il a fallu le contraindre à se dresser lui-même par intériorisation de la culpabilité.
    A. Le dressage par la moralité des moeurs.
  4. L’idée de responsabilité est une idée moderne.
    Les sociétés archaïques s’en tiennent à demander compensation à celui qui lèse, qui cause un préjudice, un dommage. La < conscience > et la < volonté > n’interviennent pas comme facteurs constitutifs ou explicatifs de l’acte.
    Sociétés du contrat et de la dette.

Ce contrat exclut l’idée de responsabilité mais enveloppe l’idée de l’équivalent-douleur d’un dommage. La partie lésée obtient réparation par la souffrance de qui a lésé.
Il existe donc un droit à la cruauté entre individus et entre individus et communautés.
Il convient de distinguer cette cruauté et la jouissance qui l’accompagne du sentiment de vengeance. Vengeance qui a constitué un ingrédient habituel des fêtes populaires.

  1. La société archaïque punit < sans raison > . Elle punit pour punir. Ce qui lui permet de s’affirmer par le châtiment. Par là s’affirme la domination de la collectivité sur l’individu.
  2. Le châtiment interdit la conscience de la faute. Être puni c’est seulement devoir payer sa dette.
    B. La conscience morale comme maladie.
    Quelle est donc l’origine de la conscience morale ?
    Réponse : elle naît d’un retournement des instincts de cruauté de l’individu vers lui même.
    Si le développement des Etats a bien joué un rôle dans la genèse du remords et du sentiment de culpabilité, la conviction de la culpabilité est due à l’interprétation religieuse qui est parvenu à persuader les hommes de leur culpabilité.
    Dette à l’égard des ancêtres, puis dette à l’égard des dieux ; enfin dette non remboursable à l’égard d’un Dieu unique.
    Le monothéisme a radicalisé l’idée de la dette : la dette ne peut plus être payée de retour. Le débiteur est insolvable. Le christianisme pousse la mauvaise conscience à l’extrême.
    Dieu se sacrifie lui-même afin de sauver les hommes.
    Conclusion.
    La conscience morale, cruauté retournée contre soi, est approfondissement de la mauvaise conscience. < Volonté de l’homme à se trouver coupable et réprouvé jusqu’à rendre l’expiation impossible, volonté de se voir châtié sans que jamais le châtiment puisse être l’équivalent de la faute. >
    C’est une maladie à éradiquer.

Note.

  1. Avec Kant et Feuerbach, l’ < Humanité > s’est substituée à Dieu. L’ idole a changé certes mais la relation d’ obligation est demeurée.
    Comme l’a montré en son temps Max Stirner.
    L’expression ultime de l’histoire de la mauvaise conscience a été donnée par ces professeurs de culpabilité que furent les Personnalistes chrétiens ( E. Mounier ) et les Existentialistes athées. Ainsi Simone de Beauvoir et Jean Paul Sartre pour lesquels il convenait de substituer à < l’esprit de sérieux >, attitude < inauthentique> faite de conformisme et de conservatisme, < l’angoisse> qu’engendre la conscience de la liberté, l'< unique fondement des valeurs>.
  1. Contre les professeurs, tous les professeurs de mauvaise conscience, une seule stratégie à adopter, l’altruicide éthique : se délivrer du poids de l’opinion des autres.
    C’est aussi cela la patagonie…

Mise en scène et… vocabulaire de la démagogie.
De Pervenche, courriel. En parcourant les gazettes…
En Avignon. < Guerra > de Pippo Delbono lu par Frédéric Ferney. 18.07.2002.
< … C’est un malin Pippo. Il recrute les épaves, il les rachète, il les sauve. Il sait que la folie est un spectacle, un miroir et un abîme; il érige le dénuement en esthétique du gouffre; il mise sur la compassion; il spécule sur la pitié, le malaise, les bons sentimens. Aimez-vous le strip-tease ? Du métier. Il plaque sur la pantomime une musique intense, lyrique, qui vous arracherait des frissons, des < nostalgies, des larmes. ça le fait. Entre chaque scène il pérore, il prêche de sa voix évangélique : < Une grande révolution ne peut naître que d’un grand sentiment d’amour > (Che Guevara). Un séminariste en sueur qui profère des vérités éternelles et des cantiques et qui boit de l’Evian au goulot en bousculant les spectateurs. ça plaît énormément.
Du talent. Un style: grunge et sulpicien. Une sorte de grand-guignol nazaréen, sans croix, avec un drapeau rouge. On l’a compris, la pauvreté, le malheur, il est contre ; la guerre, c’est mal. On est d’accord, on est piégé : s’il rugit, c’est qu’il est blessé donc sincère, si on reste froid, c’est qu’on est réac. Néanmoins on résiste et on s’interroge : quoi de plus faux que la fausse naïveté ? Quoi de plus obscène que l’ostentation de l’innocence et de la pureté ? Plus démagogique, tu meurs! >
Bref, les bonnes recettes…

Giraudoux, le poète et la richesse.
De Solange, courriel. Ce passage des Cinq tentations de La Fontaine.
La Fontaine à Vaux, au milieu des fêtes…
< Si les poètes aiment le monde, ce n’est pas qu’ils sont des parasites. Ils l’aiment non parce qu’eux-mêmes deviennent beaux ou éclatants, mais parce que ces beaux emplacements sur lesquels se passe la journée du monde, qui sont les châteaux et les terrasses, ces moments habituels du monde, qui sont les fêtes, ce goût de la toilette et du luxe qui s’ y étale, parce que la politesse, la courtoisie, le gazon et les fleurs, politesse de la terre, leur fournissent un recours, et même une vengeance contre leurs pires ennemis, la banalité et la laideur… >
Mais que faire, dans le monde ?…

Un mot de Jean de La Fontaine.
 < Si quelqu’un desserre les dents, C’est un sot. -J’ en conviens ; mais que faut-il donc faire ? -Parler de loin, ou bien se taire. >
L’ homme et la couleuvre

Un < débat de notre temps >. Prostitution.
D’ Odile, courriel.

  1. Prostitution ( éty. poser devant, exhiber ) :
    la < régulariser >, l’ < abolir > ou la < transformer en service sexuel > ?
    Trois réponses où s’opposent le Pragmatique, le Puritain et le Légiste.
    Mais surtout trois manières d’évacuer la < perversité >… c’est-à-dire la théâtralisation de l’existence.
    Et notamment à partir d’une vision hygiéniste de la sexualité.
  2. Une prostituée, une femme de mauvaises moeurs ?
    -Que disent les Ecritures ?
    < Les lèvres de la prostituée sont comme le rayon d’où coule le miel ; et son gosier est plus doux que l’huile, SACI, Bible, Prov. de Salomon, v, 3.>
    -Et le poète ?
    Adoptons l’attitude esthétique, celle par exemple d’un Mandiargues…


Remarque. Sur le proxénétisme.
Littré…
< 1. PROXÉNÈTE ( pro-ksé-nè-t’), s. m.
1° Anciennement, courtier, celui qui négocie un marché.
 2° Aujourd’hui, en mauvaise part, entremetteur de certains marchés honteux entre les deux sexes. Dans toutes les cours, il y a plus de faveur à se promettre du métier de proxénète que des fonctions de grand ministre, DIDEROT, Claude et Nér. I, 83.
HISTORIQUE : XVIe s. Proxenettes couratiers et autres commis à vendre marchandises à eux baillées, Coust. gén. t. I, p. 899. Vous vous souviendrez [vous, Henri IV] des peines et anxietez où vous ont jeté les ruses, artifices, malices et cautelles de la Verneuil, ses semblables et leurs sequelles et proxenetes, SULLY, Mém. t. VIII, p. 416. Proxenetes aux voluptez, ID. ib. t. XII, p. 265.
ÉTYMOLOGIE : Lat. proxeneta, entremetteur, du grec (voy. PROXÈNE).
aider, secourir.

  1. PROXÈNE (pro-ksè-n’), s. m. Charge civile.
    ÉTYMOLOGIE : Du grec, pour, et, étranger.
    Terme d’antiquité. Celui qui, dans une cité grecque, est l’hôte et le mandataire de tous les citoyens de la république étrangère qui lui a confié cet office. Il existe une incontestable analogie entre les fonctions des proxènes et celles de nos agents consulaires. Le proxène d’une ville en loge les députés, il les accompagne partout, et se sert de son crédit pour assurer le succès de leurs négociations, BARTHÉL. Anach. ch. 34. >
  2. Il y a donc loin de l’idée originaire, politique et valorisante de < proxénétisme > à celle plus familière et plus actuelle mais très réductrice d’ < exploitation >.
    Ce qui échappe aux considérations unilatérales des bonnes âmes, des vertueuses à conjoint et des bas bleus qui n’en retiennent, pour mieux le condamner, que les aspects -certes fort déplaisants- d’esclavage moderne qui habituellement l’accompagnent.

Pataphysique du clonage.
De Pervenche, courriel.
< La principale objection au clonage reproductif, selon le Pr Jacques Milliez, chef du service d’obstétrique de l’hôpital Saint-Antoine à Paris (22. 07.2002), s’exprime ainsi : il n’est pas normal de reproduire un individu à l’identique. Mais contrairement au cliché souvent véhiculé, un individu cloné n’est pas une simple photocopie d son modèle! En tous cas moins que des jumeaux homozygotes, lorsque l’oeuf s’est divisé en deux. Le clonage produit des individus beaucoup moins semblables car un dixième du génome vient d’une autre personne. En effet le donneur du noyau donne 9/10° du génome, le dixième restant provenant de la donneuse de l’ovule. En réalité la vraie question posée par le clonage est celle-ci : accepte-t-on qu’un être humain soit issu d’une reproduction non sexuée ? >

  1. Notons qu’il s’agit d’une contribution au débat autour des enfants nés après sélection embryonnaire pour permettre une greffe de sang du cordon à un frère ou une soeur malade ; et plus généralement à la question de savoir si un enfant peut être conçu dans le but de sauver son frère ou sa soeur atteint d’une grave maladie génétique.
    Le Professeur Milliez membre du Comité d’éthique de la Fédération internationale de gynécologie obstétrique décèle pour sa part dans cette démarche le risque d’ une dérive eugénique.
  2. Remarquons cependant que cette stricte précision technique -s’en tenant au fait sans considérations idéologiques-, semble dans sa portée scientifique prendre à contrepied, -en réfutant l’objection habituellement alléguée de la duplication-, l’obscurantisme des bigots et autres « autorités morales et religieuses ».
    Elle confortera par contre notre cher Patadelphe et justifiera ses audacieuses autant qu’ amorales < visions > d’ ouverture d’un Ouvroir d’Eugénie potentiel, Oudeupo.
    Confiant ainsi le génome aux bons soins de la plastique et aux caprices des esthètes plutôt qu’à la timidité et aux préjugés des cagots.
    Selon le mot fameux, prémonitoire et jubilatoire du Pseudo-Sandomir :
    … < Où va l’homme ? demandait Vialatte, L’homme, cette solution… imaginaire. Quelque part mais où ?… On se le demande… Echec au hasard ! C’ est à l’art de recréer la nature >.

Un mot de Maurice Rheims.
En parcourant les gazettes…
De l’auteur de Haute curiosité, commissaire-priseur, écrivain, membre de l’Académie Française, l’expression de cette conviction :
< La curiosité emporte tout sur le reste. Si l’on est pas curieux, pourquoi vivre ? Quand j’étais enfant et qu’on me demandait ce que je voulais faire dans la vie, je répondais « curieux », et j’ajoutais « à en mourir « .>

Jean Cocteau, La machine infernale.
Notes de lecture.
Florilège.
< La poésie est une science exacte. Ceux qui s’imaginent que c’est un désordre, une certaine manière d’employer la langue, se trompent. Ils ne parviendront qu’à vêtir la prose en robe du soir. > Lettre-Préface aux meilleurs poèmes anglais et américains d’aujourd’hui.

  1. Fétichisme du Système.
    < J’ai essayé, plus d’une fois, comme tous mes amis de m’enfermer dans un système pour y prêcher à mon aise. Mais un système est une espèce de damnation… Je suis revenu chercher un asile dans l’impeccable naïveté. C’est là que ma conscience philosophique a trouvé le repos.>
    Ch. Baudelaire. ( En exergue à la machine infernale )
  2. Divinités.
    Les dieux existent : c’est le diable.
  3. Divertissement divin.
    Pour que les dieux s’amusent beaucoup il importe que leurs victimes tombent de haut.
  4. Divertissement populaire et paix sociale.
    Nous avons autorisé les musiques afin que le peuple ne se démoralise pas, pour soutenir le moral. Il y aurait des crimes… et pire si on ne dansait pas dans le quartier populaire.
  5. Complexe d’Oedipe.
    Est-il plus doux ménage, ménage plus doux et plus cruel, ménage plus fier de soi, que ce couple d’un fils et d’une mère jeune ?
  1. Ne pas se mêler.
    Un conseil : laisse les princes s’arranger avec les princes, les fantômes avec les fantômes, et les soldats avec les soldats.
  2. A chacun ses énigmes.
    Le mystère a ses mystères. Les dieux possèdent leurs dieux. Nous avons les nôtres. C’est ce qui s’appelle l’infini.
  3. Jeu de masques.
    … la logique nous ( les dieux ) oblige pour apparaître aux hommes, à prendre l’aspect sous lesquels ils nous représentent ; sinon ils ne verraient que du vide…
  4. Sphinx émissaire.
    Celui… s’occupe de politique. Le Sphinx qu’il dit, c’est un loup-garou pour tromper le pauvre monde… c’est une arme entre les mains des prêtres et un prétexte pour les micmacs de la police. On égorge, on pille on épouvante le peuple, et on rejette tout sur le Sphinx. Le Sphinx a bon dos.
  5. Le sauveur.
    Il faudrait un chef qui tombe du ciel… qui tue la bête, qui punisse les trafics… qui relève les finances, qui remonte le moral du peuple, qui l’aime, qui nous sauve quoi ! qui nous sauve…
  6. Naïveté politique.
    -j’aimerai mon peuple, il m’aimera.
    -La place publique n’est pas un foyer.
  7. La Sphinge.
    Alors j’aurais couru les routes, franchi les montagnes et des fleuves pour prendre une épouse qui deviendra vite un Sphinx, pire que le Sphinx, un Sphinx à mamelles et à griffes.
  8. Temporalité.
    Le temps des hommes est de l’éternité pliée.
  1. Illusion.
    Beaucoup d’hommes naissent aveugles, et ils ne s’en aperçoivent que le jour où une bonne vérité leur crève les yeux.
  2. Vertu du sommeil.
    Le sommeil les empêchera de voir la trappe qui se ferme sur eux pour toujours.
  3. Se déclasser.
    Apprenez que tout ce qui se classe empeste la mort. Il faut se déclasser, Tirésias, sortir du rang. C’est le signe des chefs-d’oeuvre et des héros. Un déclassé voilà ce qui étonne et ce qui règne.
  4. Naïveté métaphysique.
    Prétendez-vous résoudre en une minute le problème du libre-arbitre ?
  5. Ennui de l’innocence.
    Un visage de jeune fille, c’est l’ennui d’une page blanche où mes yeux ne peuvent rien lire d’émouvant.
  6. Être un homme.
    Après les faux bonheurs, le roi va connaître le vrai malheur, le vrai sacre qui fait, de ce roi de jeux de cartes entre les mains des dieux cruels, enfin, un homme.
  7. L’arbre de la connaissance.
    Je vous mettais en garde contre votre habitude néfaste d’interroger, de savoir, de comprendre.
  8. Secrets.
    Les secrets les plus secrets se livrent un jour à celui qui les cherche. L’ homme intègre qui jure le silence parle à sa femme, qui parle à une amie intime et ainsi de suite…
  9. L’ histoire.
    Il me semble que l’histoire est du vrai qui devient faux à la longue ( et de bouche en bouche ) alors que la légende est du faux qui, à la longue, devient véritable.
  1. Conseil à la Jeunesse.
    Voilà bien des années que je travaille endormi debout, au milieu du terrible désordre des villes et des époques. J ‘ai maintenant la certitude que l’âme s’exprime dans l’ombre et le silence.Le personnage légendaire et absurde qu’on nous invente nous protège, on le pousse de force sur l’estrade de l’actualité. Il s’y repose à notre place et reçoit les coups qu’on nous destine.
    Mon conseil à la jeunesse est de vivre entre chien et loup. ( 31.10.1959.)

Hypostases, ou Plotin au Collège…
  Du Collège de ‘pataphysique cette carte :
Mes états d’âme ou les Sept Chrysalides de l’Extase…

Hypostases! Hypostases!!
PILULES METAPHYSIQUES de PLOTIN
La meilleure de toutes les métaphysiques, la seule qui ne s’éclaircisse pas en vieillissant, est fabriquée par Plotin.
Guérison radicale et prompte du sens commun.
Névroses, Neurasthénies et Migraines garanties.
Aliment débilitant recommandé par la Société générale
L’EXTASE, pour la propagande de l’anémie cérébrale chez les classes pauvres.
Exiger la marque bleue.
Prix modérés

Remarque :
Peut-être pourrait-on substituer à < Plotin>, l’auteur des Ennéades, quelques uns des représentants actuels de la philosophie à l’eau bénite, clercs, religieux ou ministres ( sic ) du néo-néo < Humanisme démocratique > contemporain, le rationalisme métaphysique de notre temps…


Aux Chevaliers du Graal, à tous les chevaliers du < Graal >, aux quêteurs de < Sens >

combat de Lancelot et des automates, Histoire du saint Graal, France, Ahun 15°

Julien Gracq, Le roi pêcheur.
Amfortas ( A Perceval ) -… Tu touches à la fin de tes peines, mais tu touches à l’heure de la plus grande épreuve… Perceval, si tu le veux, tu seras tout à l’heure roi du Graal.

Perceval -Je le verrai!… Ah! parle… parle!… Il me semble que la joie vide le sang de mon coeur… Parle moi du Graal!…
Amfortas -La parole est sans ressource… Il est lumière, musique, parfum et nourriture… Tu le verras. Tu comprendras. On le portera devant toi, et le moment sera venu de poser la question révélée en rêve… la question qu’on ne doit poser qu’une fois.
Perceval – Et je régnerai sur le Graal?…
… J’ai peur de me réveiller d’un rêve.
Amfortas -N’aie pas peur. Tu y entres au contraire, et c’est un rêve dont tu ne te réveilleras plus. Il est bon que tu le regardes en face de tes yeux d’homme, tant que tu les tiens encore ouverts…
… Je te cède un trône de péril -un glaive sans pardon -un manteau lourd aux épaules d’un homme.
… Elle (la grâce) t’inondera, en effet, Perceval. Tu dépouilleras le vieil homme. Tu dépouilleras même l’homme tout court. Comprends-tu ce que cela signifie?
… Tu baigneras dans la certitude, et c’est une chose qui dispense de regarder.
… Tu n’auras plus d’aventures. Il n’en est plus à qui possède tout. Ton aventure finit ce soir Perceval! Tu verras l’étrange chose que c’est de lui survivre.
… Tu seras en repos avec toi même pour toujours. Je te souhaite d’aimer à bien dormir.
… Là où tu entres finit l’espoir et commence la possession. Tu verras comme elle accable. La terre sera pour toi comme un oeuf -chaque chose à sa place- et plus une place à y changer.
… Le Graal dissout les espoirs fumeux et les idées vagues.
Perceval -Tu m’a empoisonné le coeur… Mes yeux se troublent… Est-il donné à un homme d’entrer vivant dans un air irrespirable -dans une gloire terrifiante comme la mort -de la vouloir -de la choisir! -de détruire pour renaître tout ce qu’il a été…?
Amfortas -Donné est le mot. Car ici le don t’écrase…

-Perceval -Tu portes le Graal à ma bouche comme un calice de Fiel


Amfortas ( A Kundry) -… Je l’ai ( Perceval ) traité mieux qu’un messie, mieux qu’un élu, mieux qu’un prophète. Je l’ai laissé choisir. Tu le poussais au Graal les yeux bandés, comme le bétail glorieux du sacrifice. J’ai préféré le traiter comme un homme…. Celui que Montsalvage attendait, c’était un simple… La folie du Graal n’est pas éteinte… Un autre viendra…


 25.07.2002.

La toilette à Cythère, Félicien Rops

vers Carnets d’une ‘pataphysicienne-2